POINTS D’OUÏE, JEUX THÈMES ET VARIATIONS

POINTS D’OUÏE, JEUX THÈMES ET VARIATIONS

Définitions

Rappelons ici que nous avons pour principaux objectifs de proposer différentes formes de lectures et d’écritures du paysage sonore in situ, que les projets qui en émanent se déclinent en plusieurs modes d’actions, de réflexions, selon les contextes.

Sans compter ici toutes celles en chantier, ou qui restent encore à inventer au fil des expériences et des rencontres à venir.

Polarités

Le projet se positionne dans une préoccupation esthétique, artistique, celle du ressenti, de l’émotion, de la beauté intrinsèque des paysages sonores, quels qu’ils soient, à écouter et à construire, et également dans un soucis de montrer la fragilité de ces espaces, la nécessité de les protéger, dans une démarche explicitement liée à l’écologie sonore.

Postures

Deux postures émergent d’emblée.

D’une part, la promenade, le parcours, écoute en mouvement, au rythme de la marche, nous allons vers les sons, improvisant ainsi une «musique des lieux» en action, selon les événement et les choix du promeneurs, d’autre part, le point d’ouïe statique, où nous laissons plutôt les sons venir à nous.

Ceci implique en fait une troisième posture qui est celle de coupler marche et arrêts sur sons, toujours en fonction des aléas du terrain.

Déclinaisons, variations

Différentes expérimentations physiques viendront enrichir les possibilités d’écoute, oreille collée à, auditeurs allongés, en aveugles, mains canalisatrices…

http://desartsonnants.tumblr.com/post/127846492966

Les écoutes dites «à oreilles nues», et/ou celles prolongées d’objets et de dispositifs.

Comme son nom l’indique, la première fait appel au seul appareil auditif embarqué par chacun de nous.

D’autres situations d’écoute utiliseront différents objets existants ou non, du stéthoscope à un jeu de «longues-ouïes» imaginées et bricolées pour l’occasion.

http://desartsonnants.tumblr.com/post/127846417806

http://desartsonnants.tumblr.com/post/113638531001

Des calligraphies, consignes, modes de jeu, injonctions poétiques décalées pourront être envisagées pour guider et orienter le parcours vers des représentations et ressentis poétiques, surprenants…

Des installations éphémères, lutherie expérimentale, installations électroacoustiques mobiles, portables et autonomes.

L’installation de cartes postales ou création sonores réalisées sur le terrain, à partir des ambiances glanées, venant frotter des formes d’imaginaires recomposées au terrain initial, ou écoutes délocalisée, de l’extérieur vers l’intérieur, ou dans différentes temporalités…

Des performances musicales (improviser en faisant sonner les lieux), dansées (proposer des postures d’écoute via la danse), des lectures performatives de textes, des écritures spontanées…

Références et inspirations

Pour élargir le projet, des acteurs – penseurs nous font creuser plus avant le sujet.

– Guy Debord et ses expériences de l’errance situationniste, de la psychogéographie

http://www.larevuedesressources.org/theorie-de-la-derive,038.html

– Michel Foucault et sa réflexion autour du concept d’hétérotopie – http://foucault.info/doc/documents/heterotopia/foucault-heterotopia-en-html

– Georges Pérec avec ses écritures, pensées et descriptions d’espaces

http://www.grenoble.archi.fr/cours-en-ligne/tixier/perec/perec.html

Et autres d’autres ressources réflexives apportées par les participants.

Transdisciplinarités

Les approches sont pensées dans des pratiques transdisciplinaires, transmédiales, convoquant à l’envi le jeu, l’écriture ou l’improvisation musicale, la création sonore acoustique et/ou électroacoustique, la danse ou la performance, le chant, la voix, la poésie, la lutherie, le land art, les arts plastiques tels le graphisme, la calligraphie, la sculpture sonore, selon les savoir-faire, les affinités et les contraintes du projet.

L’idéal étant de puiser dans un panel de gestes, d’objets, de dispositifs, pour éprouver le terrain par l’oreille, notamment lors de workshops ou d’ateliers, en résidence, sur une durée de plusieurs jours à plusieurs semaines.

POINTS D’OUÏE – MARCHER POUR MIEUX S’ENTENDRE

ALÉATOIRE ET À TRAVERS

Marcher,
Marcher encore,
Marcher toujours,
Si possible,
Emmener,
D’autres marcheurs,
Grossir les rangs,
Partager,
Ou non,
Parcours,
S’immerger,
Dans la ville,
Dans les rues,
Le long des quais,
Dans la proximité d’un territoire à trouver,
Dans les interstices,
Dans la trivialité d’un moment,
De jour,
De nuit,
Entre chiens et loups,
A l’aube,
Dans nulle part,
Ou ailleurs,
Marcher,
S’user,
Urbaniquement parlant,
Déambulation,
Se fondre dans la pierre,
Le bitume,
Dans les sons,
Dans la lumière,
Dans la pénombre,
Dans l’obscurité,
Se confondre avec des gens,
S’en extraire,
Les fuir,
Les retrouver
S’imprégner des odeurs,
S’arrêter,
Parfois,
à l’envi,
Marcher,
Ecouter,
Regarder,
S’isoler,
Péripler,
Pas à pas,
A perdre son entendement,
Ou l’aiguiser,
Qui sait,
Errance,
Ne pas résister,
Se couler,
Dans un flux,
Ou plusieurs,
ans le courant,
A contre-courant,
Oublier,
S’oublier,
Marcher,
Solitaire,
De concert,
Flânerie,
Frôler,
Se glisser,
S’immiscer,
Trouver les failles,
Les aspérités,
Le lisse,
Le rugueux,
La foule,
Le silence,
Le chaos,
Ou un semblant de chaos,
Le vide,
Le plein,
L’entre-deux,
Avancement,
Etre stoppé,
Découvrir l’obstacle,
Trouver l’allure,
Ou non,
Emmener,
Sur ses traces,
Dans l’éphémère,
Faire durer,
Perdurer
Inviter,
Sans forcément savoir à quoi,
Se poser,
Se laisser submerger,
Envahir,
Déborder,
Céder,
S’aider,
Ne pas calculer,
Sensations,
Ne pas préméditer,
Frissons,
Ne rien lâcher,
Ou lâcher prise,
Eprouver,
Le végétal,
L’humain,
La pluie,
Le vent,
L’inconscience,
Aller vers la musique,
Le brouhaha,
Le tintamarre,
Le chuchotement,
Le non entendre,
Ou s’en éloigner,
Echanger,
Un regard,
Un sourire,
Une complicité fragile,
Une incompréhension latente,
Une parcelle d’invisible,
Marcher,
Aller vers,
Aller contre,
Aller avec,
Aller sans,
Aller, encore
Souvenirs,
Du paysage ouvert à l’incertitude,
Association,
Ou rupture,
Perdre ses repères,
En trouver d’autres,
Peut-être,
Avancer,
Point de chute,
Détours,
Impasses,
Passages,
Reliefs,
Platitudes,
Accentuations,
Rondeurs,
Traversées,
Un semblant d’initiatique,
Une terne réalité,
Des pans de rêves cités,
Les mots s’étirent,
L’esprit se noie,
Trop de sensations sauvages,
Zig-Zag,
Du coin de la rue,
Du pied de l’escalier,
A la porte de je ne sais où,
De ruelles en collines,
Se régénérer,
Se défiler,
Filer,

Ecouter

Transcender,

Dans la marche, erratique, ou écrite…

Texte en écoute, lecture croisée avec Valérie Champigny

POINT D’OUÏE – DEUX PROMENADES SONORES AVEC HOËLLE CORVEST

ÉCOUTER SAILLON 

Une fois n’est pas coutume, je vous présente aujourd’hui une balade sonore intégrale, non pas impulsée par Desartsonnants, mais par Hoëlle Corvest.

9 heure du matin. lors du 2e Congrès mondial d’écologie sonore, Hoëlle Corvest, membre du Colllectif Environnement Sonore, aveugle, chargée de l’accessibilité pour le public déficient visuel à la Cité des Sciences et de l’Industrie de Paris, nous emmène faire une promenade écoute quotidienne. Hoëlle possède une capacité à faire entendre et à débattre de l’espace sonore qui fait de ses promenades de merveilleuses expériences sensibles.

Nous sommes dans un petit village du valais Suisse, à Saillon, en aoüt 2012.

En écoute, deux journées, deux promenades, deux paysages sonores. Prenez le temps d’écouter, fermez les yeux…

1ère promenade, prise de son Laurent Choquel

2e promenade, prise de son Desartsonnants

POINT D’OUÏE À VITRY SUR SEINE

CARTES SUR TABLE À VITRY-SUR-SEINE

Ce jour là, j’étais passé à Vitry pour discuter avec Mustafa, le directeur de Gare au théâtre de projets en cours, mais également pour me promener dans Vitry et m’en imprégner de l’ambiance. Une grande fête de quartier battait son plein, avec braderie, danses, et un personnage que j’avais envie de croiser sur l’un de ses ateliers urbains.

Dans le cadre de cetr atelier, une grande carte étalée sur une table, avec Nicolas Fonty, architecte, urbaniste cartographe, qui questionnait, animait moult conversations sur la vie du quartier (les Ardoines), et proposait un jeu débat autour des espaces encartés.

Le fait de proposer une grande carte en libre accès incitait les gens à venir spontanément autour. Tout d’abord, repérer où on habite, sa rue, sa maison, son immeuble, l’école de ses enfants, le stade, la gare. Puis commenter, ce qu’on y voit, ce qu’on y vit, les plaisirs et les petites misères, l’avenir du quartier en restructuration…

Les dialogues se nouent naturellement – On est ici – Non, la carte est dorientée ainsi on est là – Et ces travaux qui n’en finissent pas !… Rien de telle qu’une carte pour établir des contacts, faire que les passants se parlent. Dialogues confus parfois, beaucoup de voix superposées, mais néanmoins très riche.

J’avais prévu ce jour là de tendre mes micros plutôt dans le quartier, aux bords de Seine, sur la brocante…

Cependant, la richesse des échanges m’ont fait changer mes micros d’épaule et finalement passer une bonne partie de l’après-midi autour de cette table carte de discussion.

Tranches de ville à Vitry-sur-Seine, lors d’une fête de quartier.

Par Gare au théâtre, dans le cadre de frictions urbaines.

POINT D’OUÏE LYONNAIS, FAÇON PÉREC

TENTATIVE D’ÉPUISEMENT D’UN POINT D’OUÏE LYONNAIS , FAÇON PÉREC

Hier, mardi 18 août, aux alentours de 21H, assis sur les marche du Théâtre Nouvelle Génération, rue de Bourgogne à Lyon, 9e arrondissement.
Une légère pluie vient tout juste de cesser, l’air est agréable, presque frais. La nuit est maintenant tombée.

Lorsque le magnétophone connait ses limites, les mots s’y substituent…

Devant moi, une intersection avec des feux tricolores, des voitures de tous genres passent, s’arrêtent, passent, s’arrêtent, passent, s’arrêtent… Voitures, camions, motos, à chacun sa façon de vrombir…
Un bar ouvert, le patron rentre tables et chaises en causant fort avec des clients à l’intérieur.
Une jeune femme passe tout près, d’un pas pressé. Ses tongues claquent sur l’asphalte mouillé.
Une voiture anime la rue des puissants cliquetis de la grosse remorque métallique qu’elle tracte. On l’entend venir bien avant de la voir et partir bien après l’avoir perdu de vue. Hors champ.
Un vélo traverse le scène, en silence.
Un bus en colère klaxonne rageusement après une voiture qui lui a joliment grillé la priorité.
Un train de marchandise, sur la droite, hors-champ, n’en finit pas de secouer le paysage de ses rythmes saccadés, réverbérés par les constructions adjacentes et les deux ponts de pierres qu’il enjambe.
Le clocher de l’église de l’Annonciation, que l’on voit émerger des toits, égrène ses neuf coups, avec de surprenants échos qui feraient croire que deux clochers se répondent très rapidement.
Un groupe de promeneurs déambulent en parlant de vive voix d’un spectacle apparemment très apprécié.
Des gens fouillent les poubelles d’une supérette, on entend les froissements des sacs en plastique et les fermetures des couvercles.
Une moto, monocylindre, (Harley peut-être?) démarre du feu avec un tintamarre à la fois beau et à la limite de ce que le paysage urbain, et ses habitants, puissent supporter.
Un père de famille portant sur ses épaules une fillette, lui fredonne une chansonnette que l’enfant a l’air de fort apprécier.
Deux personnes regardent à leur fenêtre, en silence.
Un autre train, plus discret et plus court celui-ci.
Le bar ferme ses portes dans un bref mais énergique roulis métallique.
La supérette ferme également ses portes sans particulièrement se signaler à l’oreille, seule l’extinction de ses lumières atteste de sa fermeture. Le quartier, petit à petit, presque en catimini, se blottit un peu plus profondément dans la nuit.
Un jeune homme africain arrive en chantant, me demande du feu avec une voix joviale. Come je lui répond que je n’en ai pas, du fait que j’ai cessé de fumer, il me répond dans un grand rire que j’ai bien de la chance, et s’en va en m’adressant un sympathique signe de la main.
Les voitures se raréfient progressivement, jusqu’à laisser de temps à autre, de vraies plages de silence, durant quelques secondes en tout cas… Surprenant et apaisant.
Un jeune homme chevauchant un Vélov (bicyclette urbaine en libre location) tente de venir arrimer sa monture à la station se trouvant à quelques mètres de moi. Comme il n’y a pas d’espaces libres, il repart en grommelant.
Nouveaux tintements des dames d’airain dans leur tour de pierre, qui semblent rassurer le quartier. Dormez tranquilles braves gens, nous veillons sur vous…
Des adolescents, garçons et filles, arrivent en parlant haut et fort, en chantant et en faisant tintinnabuler leur réserve de bouteilles qu’ils portent dans de grands sacs. Le calme reprend peu à peu le dessus lorsqu’ils s’éloignent. La rentrée étudiante s’approche.
La fenêtre d’où observait le couple s’est refermée, sans bruit.
Un autre train se fait entendre, toujours invisible, de voyageurs celui-ci.
L’heure avançant, les événements deviennent moins denses, le quartier s’apaise, je décide alors de rentrer.

Ainsi va la ville, ou tout au moins une tranche de ville, lorsqu’on lui prête l’oreille

POINTS D’OUÏE ET PAS DE DEUX – PARCOURS AUDIO SENSIBLES EN DUO

PAS – Parcours Audio Sensible en duo d’écoute

PAS – avec Céline Grisoni – départ de la gare Saint-Paul

Un lieu donné, espace urbain, site naturel, architectural…
Desartsonnants, invite un résident, à partager une promenade de concert.
Un rendez-vous est pris.
L’invité choisit le lieu de départ, la durée, le parcours, le moment…
Un dialogue s’établit autour des choses vues et entendues, des ressentis, des impressions, images mentales, spontanées…
Ce parcours est enregistré dans son intégralité, comme une mémoire, trace sonore, carte audio .
La matière sonore captée in situ pourra être, par la suite, retravaillée; éventuellement associée à des photos, écrits, et ensuite installée ici ou là, en prolongement du parcours, enrichi d’expériences de terrain en duo…
Une œuvre participative, à plusieurs voix, déambulatoire, contextualisée, se construira ainsi, au gré des rencontres et des promenades.

Vous êtes intéressés pour proposer un nouveau PAS en duo d’écoute ? desartsonnants@gmail.com

PAS en duo avec Patrick Mathon – Lyon pentes de la Croix Rousse

Des traces de PAS en duo d’écoute

Maxime Jardry – https://www.mixcloud.com/desartssonnants/pas-parcours-audio-sensible-duo-d%C3%A9coute-avec-maxime-jardry/

Patrick Mathon – https://www.mixcloud.com/desartssonnants/pas-parcours-audio-sensible-duo-d%C3%A9coute-avec-patrick-mathon/

Yannis Kosmas – https://www.mixcloud.com/desartssonnants/pas-parcours-audio-sensible-duo-d%C3%A9coute-avec-yannis-cosmas/

Marjolaine Pont – https://www.mixcloud.com/desartssonnants/pas-parcours-audio-sensible-duo-d%C3%A9coute-opus-4-avec-marjolaine-pont/

Céline Grisoni – https://www.mixcloud.com/desartssonnants/pas-parcours-audio-sensible-duo-f%C3%A9coute-avec-c%C3%A9line-grisoni/

Geneviève Girod – https://www.mixcloud.com/desartssonnants/pas-parcours-audio-sensible-duo-d%C3%A9coute-avec-genevive-girod/

Quentin Thirionnet – PAS (Parcours Audio Sensible) Duo d’écoute à Confluence avec Quentin Thirionet by Desarts Sonnants | Mixcloud.html

Péroline Barbet – https://www.mixcloud.com/desartssonnants/pas-parcours-audio-sensible-avec-p%C3%A9roline/

POINTS D’OUÏE, L’INVITATION À L’ÉCOUTE

AU FINAL, SE CONFRONTER AU TERRAIN

Œuvrer à un catalogage de sites auriculaires remarquables, à un état des lieu des paysages sonores, à un répertoire de points d’ouïe me parait au final une vaste utopie, et en tout cas une volonté somme toute assez prétentieuse.

Pourtant, raconter par des mots, des sons, des images, un territoire sonore, l’enregistrer quelque part en l’écrivant sur quelques pages d’un livre, ou sur un des innombrables recoins de la toile n’est pas un geste vain, tant s’en faut.

Cette trace, inscrite et partagée, prend alors tout son sens lorsqu’elle incite le lecteur à aller se frotter au terrain, lorsqu’elle lui donne envie de s’émoustiller les sens en les confrontant à un chemin sauvage, un arbre, un ruisseau, une rue, une ville…

C’est là la véritable force de la trace répertoire, non pas de dresser un tableau représentatif de paysages sonores, mais de faire rêver de potentiels promeneurs écoutants, de les inviter à un voyage d’écoute, physique, de leurs montrer les beautés intrinsèques en même temps que la fragilité de certains lieux, et la nécessité d’en préserver leurs richesses.

Le projet Points d’ouïe convie à une expérience esthétique in situ, qui n’a d’autre volonté que de changer votre regard/écoute de sites choisis, en vous invitant à vous y frotter physiquement. Pas moins que cela !

POINTS D’OUÏE – BEAUMONT, UN MATIN ESTIVAL

BEAUMONT MATINAL

Ce post fait suite à celui consacré au Sentier des Lauzes puisqu’il s’agit d’une séquence enregistrée au cours du même séjour.

Il fait écho également à la prise de son de Raymond Delepierre, qui m’accueillait dans ce magnifique site, captation effectuée sans concertation aucune, peu de temps après, entre autre dans la même église.

7 heures du matin, à Beaumont, petit village joliment perché à flanc de collines, au cœur des cévènes  ardèchoises, il fait encore une relative fraîcheur. Le village est endormi, il se repose d’une éprouvante journée aux températures très élevées. Je jette un petit coup d’oreille sur la place centrale du village avec tout d’abord, l’Angelus entendu de ma chambre, puis un petit test acoustique vocal dans l’église pour finir avec une note rafraîchissante du lavoir juste en contrebas de cette même église. Les cigales quand à elles ne sont pas encore réveillées. Sans doute ont-elles trop fait la fête et chanté la veille, dans ces journées caniculaires de juillet. Chose surprenante à la réécoute, la cloche, la voix et la résonance de l’eau dans le lavoir voûté de lauzes sont toutes quasiment accordée sur une même fréquence… Une douce musique des lieux en quelque sorte.

POINTS D’OUÏE – MALVES EN MINERVOIS EN ÉCOUTE

MALVES EN MINERVOIS  EN ÉCOUTE

PARCOURS D’ÉCOUTE ET INSTALLATION SONORE

Invité dans le cadre du festival « Mai numérique » à Malves en Minervois, je m’installe une semaine dans ce beau vilage entouré de vignes, logé dans un chateau s’il vous plait. J’arpente le village et ses alentours de nuit comme de jours. j’en tire une carte postale sonore qui sera installée dans une salle voûtée obscure, et retraitée en temps réelle de façon plus ou moins aléatoire. Cette installation sonore servira de point d’arrivée à des promenades écoute.

REPÉRAGE

Exploration Nocturne

« Je rentre tout juste d’une première promenade écoute nocturne à Malves en Roussillon. Petit village niché à flanc de coteau, au milieu des vignes, des champs et des forêts; l’écoute y est de l’ordre du « Presque rien », pour paraphraser Luc Ferrari. Mais c’est justement ce qui fait tout. Pas de pollution automobile (deux ou 3 autos croisées en 1H30 environ), chaque son, glougloutis de fontaine, chiens aux loin, cloches, murmures derrière les volets; oiseaux nocturnes, pas résonnant dans les étroites ruelles, grésillement de transformateur… contribuent à ciseler un espace d’écoute joliment bruissonnant. Le magnétophone à d’ailleurs du mal à transcrire ce fourmillement synesthésique nocturne ou sons, vents, odeurs et lumière émoustillent les sens en alerte. La suite avec une exploration diurne…

Exploration diurne

« Chaque lieu exploré à l’oreille, chaque séjour dans un espace sonore, urbain, rural ou naturel, nous invite à construire un récit tissé d’images sonores. Hier, à Malves en Minervois, une exploration auriculaire diurne, pour faire suite à celle nocturne de la veille. Et toujours ce sentiment de calmé posé, où chaque son prend sa place sans qu’aucun ne vienne s’imposer. Un doux récit emprunt d’une certaine sérénité, construit par le pointillisme d’une multitudes de bribes sonores fugaces.

 » Une brèche sonore plus imposante excite cependant le bas du village, par la porte ouverte d’un atelier de menuiserie ébénisterie. A la sympathique invitation de l’artisan maître des lieu, j’y entre et capte les hurlements et stridulations aigus des scies circulaires et raboteuses. En ressortant, par effet de contraste le village ne m’en paraît que plus calme. 10H30, l’école déverse dans la cours de récréation un flot de jeunes enfants. Leurs voix égaient soudainement le centre du village. 11H, la cloche haute perchée sur son campanile leur répond en contrepoint bien sonnant. Chaque élément se met en place en même temps qu’il construit ce récit topophonique, paysage sonore Minervois. Charge à moi maintenant de le réécrire, à ma façon, mais sans en trahir la sonorifique moelle. »

http://desartsonnants.tumblr.com/post/91667557936/balade-sonore-malves-en-minervois-festivalMai Numérique : http://www.graph-cmi.org/

Annexe : Bancs d’écoute à Malves

POINTS D’OUÏE – A EN PERDRE L’ENTENDEMENT, VOIRE L’ENTENDEUR !

Ne suivez pas forcément le Dieu Guide !

Si j’avais à écrire des audioguides, ce que du reste je ne fais pas, je ne chercherais surtout pas à guider les utilisateurs. – Paradoxe ? – Je m’emploierais à les perdre. A leurs donner une sorte de mode d’emploi piégé de la dé-route. Un guide du détournement. Des conseils pour sortir des sentiers battus, pour abuser des chemins de traverses, ou de ceux des écoliers, ou tout autre fantasque itinéraire qui de fait n’en serait plus un – Brouillage – Je leur donnerais le goût de l’impasse intime, de l’escalier trivial, de la friche résistante, de la cour désuète, de la banlieue inassouvie, des usines menaçantes, de la ville encanaillée… Et mille autres urbanités bien rangées à l’abri du regard, et de l’oreille.

Je proposerais aux promeneurs potentiels de lire un plan à l’envers, de le découper en carrés puis de le recoller sans logique géograhique, de surajouter leurs propres lignes de pensées, ou de direction, des symboles d’espaces capricieux, des échelles dé-mesurées…

Je conseillerais de déambuler avec « Espèces d’espaces » de Pérec et le texte « Hétérotopies » de Foucault en poche.

Si j’avais à écrire des audioguides, j’y perdrais tout sens de l’orientation, si tant est que je l’eusse, j’irais jusqu’à perdre mon quartier latin, si tant est qu’il m’appartint.

POINTS D’OUÏE – LE QUARTIER DU VALLON À LAUZANNE

PAS – Parcours Audio Sensibles et résistance

Le quartier du Vallon à Lausanne

http://desartsonnants.tumblr.com/post/107503206911/%C3%A9couterep%C3%A9rage-avec-jeanne-schmidt-quartier-du

Ce premier texte de 2015, j’ai décidé de l’orienter très personnellement, aux vues des événements tragiques qui ont endeuillé cette année naissante, vers la question de la résistance. Résistance liée aux gestes et aux réflexions d’un promeneur écoutant, aux habitants, aux politiques, aux acteurs locaux, au terrain même. Cette approche, subjective et assumée en tant que telle, s’appuie sur de très récentes promenades écoute à Lausanne, avec Jeanne Schmid, artiste plasticienne suisse, et l’association préparant les JAU 2015 (Journées des Alternatives urbaines).

Le projet de ces rencontres, pour lesquelles j’ai été invité à prêter l’oreille, s’est implanté dans un quartier en voie de requalification urbaine. Quartier discret, niché dans ses collines abruptes, presque à demi caché, voire un tantinet méprisé par le reste de l’agglomération aux dires de certains. Il s’agit du quartier du Vallon, à deux pas du centre historique de Lausanne. Dans ce dernier, nous avons longuement devisé, en le parcourant de long en large, de choses et d’autres, essentiellement liées aux lieux traversés à pied. Qu’est-ce qui fait que, au-delà des projets d’aménagement, l’on puisse s’intéresser à ce territoire en particulier ? La diversité de sa population, de ses couches sociales, de ses ethnies, de ses topologies, de ses paysages multiples, de choses qui relèvent du ressenti, difficiles à formaliser, à partager ? La variété des ambiances sonores et visuelles qui, vues sous des angles plus ou moins décalés, peuvent nous surprendre dans leurs poésies révélées…?

C’est en arpentant longuement, lentement, le Vallon, escalier par escalier, de places en forêts, de zones industrielles en lieux culturels alternatifs, que petit à petit, nous mesurons combien ce dernier, comme beaucoup d’autres d’ailleurs, résiste à la fois à notre analyse de prime abord, et aux cases dans lesquelles nous serions à même de le contraindre. La première des résistances viendrait donc du lieu lui-même, qui ne se laisse pas apprivoiser, comprendre dans toutes sa diversité, aussi facilement que cela. Les scènes qu’il nous offre ne sont pas celle d’une ville suisse propre, nette et sans aspérités. Notons bien que je parle là comme un français qui constate que les clichés et a priori ont la vie dure. Entre poubelles éventrées, déchets jonchant le sol de certains passages et décharges publiques junkies peu ragoûtantes dans des sentes forestières à deux pas d’un centre hospitalier, la vision proprette d’une ville suisse « en prend un coup». Ce quartier héberge également des friches artistiques et des théâtres ouverts à des expériences collaboratives, lieux alternatifs, ou intermédiaires dirait-on aujourd’hui, lieux de résistance invitant à des rencontres et autres projets citoyens. Il héberge également plusieurs lieux sociaux, foyers d’accueil, que vraisemblablement le centre historique ou les rives du Léman ne souhaiteraient pas forcément accueillir.

Abritant une population plutôt modeste, le Vallon semble donc résister, sans doute bien malgré lui, à l’ambiance plus lisse d’une ville aisée, calme, tournée vers le lac Léman, en contrebas, somme toute assez éloigné. Il constitue une sorte de dent creuse, un brin sauvage, à deux pas du centre ville, destinée à être redessinée, dans un futur proche, à l’aune d’une profonde réhabilitation. La question, la problématique qui se pose aux aménageurs en charge du programme, est d’ouvrir ce quartier sur la ville, et sans doute de « l’assainir », d’en étendre ses possibilités de logement, tout en conservant cette mixité sociale et culturelle, cette sorte d’exotisme urbain qui, au final, paraît cimenter et forger son âme actuelle. Peut-être un grand écart, ou en tout cas un pari qui fera que cet espace encore « rebelle » subira, ou non, une plus ou moins forte gentrification, liée intrinsèquement aux valeurs immobilières, à la cohabitation de logements sociaux et de plus grand standing. Bref, un problème assez récurrent pour ce genre de quartier, cible entre autre de promoteurs avisés, objet de communication des politiques urbaines, comme dans de nombreuses autres villes.

Le Vallon, toujours lui, est  ardemment défendu par un comité d’habitants très motivé, notamment via un engagement dans des propositions d’aménagement de ses espaces publics. Non seulement des propositions, mais des réalisations effectives, collaboratives, in situ – par exemple celle d’un bâtiment d’accueil pour des adultes marginalisés bâti à plusieurs mains. Construire de genre de lieu est indéniablement une forme de résistance, de coup de pouce social, d’action de terrain et pour le terrain et ses résidants les plus défavorisés.

Les différents paysages qui le composent, nous emmenant d’une zone très habitée jusqu’à la lisière de la ville, entre forêts sauvages et escarpées, bâtiments industriels et architectures assez disparates, confèrent au final à ce quartier une unité et un charme incroyablement attirant. Quand aux sonorités qui le font vivre à l’oreille, elles sont très variées, mises en valeur par une topologie de creux et de bosses (très prononcées), ou les échos et réverbérations se jouent joliment de l’espace. On passe très rapidement d’une scène acoustique à l’autre, sans que l’oreille n’aie le temps de s’ennuyer un seul instant, de jour comme de nuit. Le bourdon de la cathédrale en contre-bas, nous arrive comme une source diffuse, à la fois très présente et discrète, incroyablement réverbérée par les vallonnements de la ville et les nombreux recoins architecturaux du quartier. Les voix sont assez présentes, sonnent claires, sans envahir l’espace qui reste assez aéré acoustiquement. Entendue d’une colline à l’autre, l’activité de dépôts municipaux, de nuit, prend une couleur toute particulière, en sons joliment et presque étrangement réverbérés, musicaux dans leur rythme, tonalité, spatialisation…Bref, du bonheur à partager pour des promeneurs écoutants de tous crins.

Pour nous, écouter le Vallon attentivement, sans a priori, avec respect, le regarder, le scruter, l’ausculter dans ses moindres recoins, est une façon de construire des approches, des postures, qui tenteront de ne pas s’enfermer dans une vision trop réductrice, ne négligeant ni des attraits ni les dysfonctionnements du quartier. Une façon de lui donner aussi une parole vive. Parole d’experts qui le parcourent, l’analysent, le (re)pensent, paroles d’habitants et de résidents, quels qu’ils soient,  qu’il ne faut surtout pas oublier, et encore moins négliger, parole qui devrait, qui doit être ouverte, au-delà de toutes conditions sociales, religions, obédiences politiques, aujourd’hui plus que jamais. Il faut rester très vigilant et critique, pour résister aux pressions singulières de tous bords, tout comme aux pensées uniques tissées de mille a priori et préconçus.

Au-delà de ce premier arpentage/repérage, l’idée est de proposer, lors des prochaines JAU (Journées des Alternatives Urbaines), en mai prochain, en collaboration avec différents acteurs locaux, plusieurs parcours sensibles imbriqués donnant à voir et à entendre le quartier, dans ses choses évidentes, triviales, comme dans ses parcelles les plus secrètes. Un des axes étant de faire ressurgir en mémoire des éléments aujourd’hui disparus (funiculaire abandonné, dont on voit encore la gare de départ et certaines traces d’ouvrages d’art enfouis dans la nature, rivière souterraine, le Flon entièrement recouverte…). Remettre à jour des vestiges visuels, architecturaux, y compris sonores, donner à entendre des sons fantômes, depuis longtemps disparus, pour certains d’entre eux, est une façon de conjuguer l’histoire et le présent, en gardant un œil sur l’avenir, voire de faire en sorte que la mémoire résiste à un trop grand effacement du passé. Il ne s’agit pas de prôner une nostalgie du « c’était mieux avant ». On peut au contraire, partir d’un état des lieux, d’une mémoire enfouie, pour aller vers une démarche prospective, mais sans pour autant faire table rase de toute une histoire sociale, de l’évolution d’un quartier au fil du temps.

Parcourir ce quartier, c’est donc pour nous résister, pour peut-être prévenir le risque d’une urbanisation galopante, massive et trop unificatrice qui  ferait perdre son âme au lieu. Résister c’est tâcher de préserver une mémoire de territoire éclectique, socialement brassée, avant que la réhabilitation ne lui fasse une peau neuve peut-être trop lisse. Résister c’est faire en sorte que l’expérience sensible des parcours urbains, via l’oreille et le regard, soit le théâtre de découvertes inouïes, révélant un territoire caché, hétérotopique dans le sens où le définissait Foucault. Résister, c’est prendre et donner la parole, mettre en place des projets d’installations, de mises en scènes éphémères, d’ateliers partagés, faire prendre conscience des beautés intrinsèques des lieux, qui ne se révèlent pas de prime abord, sans que l’on ai creusé un tant soit peu son territoire en le parcourant, en rencontrant ses résidents.

En ce début d’année marquée du sceau d’une violence et d’une intolérance insoutenable, la résistance est aussi celle de prendre le temps d’aller à la rencontre des lieux, des gens, de prendre du recul pour que ces Parcours Audio Sensibles, ou Sensibles tout court, placent l’humain au cœur du projet, entre silences respectueux, éloquents, paroles partagées et images plus ou moins fugitives.

Ecoutez la carte postale sonore

Une petite carte postale sonore des Journées des Alternatives urbaines à Lausanne, les 08, 09 et 10 mai 2015, quartier du Vallon

Très occupé et concentré sur l’accompagnement de balades sensibles, et autres petites installationsson ores, avec l’artiste Jeanne Schmid, je n’ai pas réalisé beaucoup d’enregistrements in situ durant ces JAU, ni hélas pu réellement assisté à la belle et foisonnante programmation concoctée pour l’événement.

Néanmoins, quelques traces sonores ont toutefois été puisées dans le vivier de ces rencontes oh combien toniques.

Tout d’abord, de la préparation, tables, chaises, chapiteaux, repas participatifs, des organisateurs et bénévoles (en principes avec les deux statuts cumulés…) sans qui rien n’aurait été aussi riche.

Le retour d’une première balade avec un groupe de migrants primo arrivants de 5 à 6 nationalités, accompagnés de leur professeur de français ,durant un stage intensif. Un retour sur expérience d’une grande chaleur humaine, sensible, comme d’ailleurs l’ensemble des balades.

Désartsonnants se promène sur le site, dialogue avec des rencontres impromptues, à micros ouverts.

Un jeu collectif avec des instruments d’écoute au cours d’une balade, expériences d’écoute et de production sonores, on « se téléphone », on ausculte les arbres, l’herbe, la pierre, on vise les sons…

Retour au théâtre, dehors, les rencontres se tissent, autour de la cuisine, du bar, des tables dressées pour l’occasion… Dedans, une conteuse nous en fait entendre de toutes les couleurs, bruit de l’Amazonie à portée d’oreilles et de voix…

Encore une balade, et la rencontre avec un tuyau extraordinaire. Il s’enfonce très profond sous terre, et lorsque l’on y crie, ou l’excite avec une trompe, comme ici, on entend presque 10 secondes d’une magnifique réverbération. La prise de son est garantie naturelle, sans adjonction d’aucune réverbération ni d’aucun autre effet audionumérique !

Pour finir, une cour intérieure, très haute, vitrée à son sommet. Des fenêtres s’ouvrent sur 3 ou 4 étages. Un groupe de chanteuses s’y postent,  racontant dans une belle sérénité l’histoire de cette « maison ouvrière moderne », écrite et mise en musique pour l’occasion par la compositrice lausannoise Joséphine Maillefer. Ce final fait superbement sonner l’acoustique du lieu dans une douce poésie apaisante. Des bulles de savons tombent doucement des étages, comme portant les sons délicats jusqu’au creux  de l’oreille des auditeurs.

Et tant d’autres beaux moments, expériences sensibles, échanges, discussions, partages qui, à défaut d’avoir été fixés sur l’enregistrement restent gravés dans ma mémoire.

De grands mercis

A  Jeanne qui m’a invité à cette belle aventure humaine et bruissonnante, et avec qui j’ai travaillé de longs moments, à distance et in situ, dans une réelle et belle entente, comme il se devait pour ce genre de projet…)

à toute l’équipe des JAU pour leur gentillesse et leur engagement, tout particulièrement à Jérémy et Régis, maîtres d’œuvre, mais aussi à l’équipe (Aurore, Michel, Annick, Marie, Elise, Gian Paolo…) pour hébergement, la cuisine (à la cuisine !!!) et tout le reste…

à Yannick pour ses bons et sympathiques coups de main, en balade, et en hauteur…

à Claude pour tout le temps passé, caméra, et magnétophone en main, et pour tous ces échanges autour de la chose sonore, de l’écoute, de la radio

à Pascal et à toute son équipe pour son dynamisme, et grâce à qui, avec Marie un financement pour l’impression du guide « Balades sensibles » a été trouvé.

au groupe de Parkour lausannois qui ont véritablement fait danser les murs

à Joséphine Maillefer pour avoir composer une musique vocale et « tintine à bulles » originale, et à ses chanteuse pour avoir enchanter la cour d’un immeuble moderne de leurs belles voix

A Julien Sansonnens pour avoir complété nos balades par une déambulation féniculairante

à Pierre Corajoud pour ses sympathiques et précieux renseignements,

A tous les bénévoles qui nous ont prêter main et oreille fortes dans l’accompagnement de nos balades

Au staff du théâtre 2.21 pour leur disponibilité et leur efficacité

Au généreux prêteurs d’appartement qui nous ont hébergé dans de belles confortables conditions…

Et à toutes celles et ceux que je pourrais oublier, avec qui j’ai pu échanger…

http://alternativesurbaines.ch/

https://jeanneschmid.wordpress.com/

POINTS D’OUÏE – EXPOSITION DE SONS VIVANTS

TOUS LES SONS SONT DES SONS,

ET INVERSEMENT !

Exposition sonore temporaire,

virtuelle,

éphémère,

à l’air libre,

et à 360°…

 

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Une galerie sonore

Une galerie virtuelle, mais néanmoins bien réelle, à même la rue, via un parcours d’œuvres sonores bruissonnantes, à ouïr in situ, et pas ailleurs.

Un commissaire, guide, médiateur, qui emmène un groupe pour la visite d’une exposition originale, constituée des sons vivants, et donc en partie imprévisibles, qui sont en fait les propres sonorités de la ville, données à entendre comme de véritables compositions sonores….

Une collection d’œuvres sonores inédites, inouïes, intangibles, immatérielles, éphémères, aléatoires, originales, mais bien en sons !

Peut-être le préambule d’un (grand) projet à venir le «Musée des sons vivants et des sites auriculaires remarquables», projet visant en partie à dénoncer une trop forte muséification paysagère en même temps que patrimoniale, sclérosante, en revendiquant l’instantanéité sensorielle comme processus artistique dynamique.

Vernissages, inaugurations de cadres d’écoute, de points d’ouïe, urbains, ou non…

Lieu de l’exposition ou des vernissages, inaugurations, ici ou là, dans le centre ville, la banlieue, la campagne, la nature, dans un site architectural, industriel, un jardin, une forêt, un lac…

Durée de l’exposition, le temps de la visite, très longtemps après, voire plus, si affinités.

Installation, accrochage de l’exposition : un repérage préalable, c’est tout ! Aucune assurance des œuvres sonores ni installations fixes ne sont requises.

Scénographie : Lumières, architectures et sons naturellement et intrinsèquement in situ, cadres et d’écoute et sons mobiles, aucune régie technique nécessaire

Vernissage, inauguration de points d’ouïe : en présence des autorités locales compétentes, concernées, et du public (en l’occurrence tout public)

Exemples de sons vivants exposés dans leur contexte typologique, historico social et esthétique…

– Archéologie et patrimoine, les cloches (sonorités historiques et lutherie urbaine)…

– Design sonore et industrie, la voiture, l’engin de chantier, l’ustensile électrique, la ventilation…

– Média, animation commerciale, radio, sonorisation urbaine, musicien de rue…

– Société, les voix, les pas, les gens qui passent, beaucoup de gens…

– Environnement, l’eau, le vent, les arbres, les oiseaux…

– Acoustiques, réverbérations, échos et autres effets sonores…

Quelques titres

Rumeurs urbaines – Muzac festives – Flux mécaniques – Pointillisme avicole – Voix-ci, voix là ! – Bonnes ondes – Ecoute en chantier…

PS : Les œuvres sonores présentées seront généreusement offertes au public en fin de visite, si elles existent encore ! Leur valeur marchande se mesure en TPE (Taux de Plaisir à l’Écoute), valeur mondiale, partageable et échangeable dans le monde entier, sans aucun frais ni formalité. Pas de spéculation auriculaire !

Chargé de projet, commissaire, médiateur et guide : Gilles Malatray/Desartsonnants

Organisation : Coproduction Desartsonnants, structures et partenariats locaux.

* En hommage à John Cage

QUESTIONS DE POINTS D’OUÏE

Points d’ouïe  ?

Sam Merrill Trail to Echo Mounta

Comment aborder un site, sensoriellement, en saisir ses grandes lignes, comme ses subtilités, en décrire/écrire le(s) paysage(s), y compris avec les oreilles, partager des découvertes in et out situ, les connaissances et émotions liées à ces expériences ?
Comment dépasser l’événement, le superficiel, l’annecdotique, le tape à l’œil (et à l’oreille)?
Comment enclencher une démarche durable, des échanges multiples, des réseaux actifs, la mise en place de ressources partagées à long terme… ?
Comment élargir le geste artistique, esthétique, vers une éthique à défendre via notament l’écologie sonore, voire l’écologie tout court ?
Comment la marche, le parcours, peuvent-ils être à la fois outils d’exploration et des productions artistiques ancrés dans un territoire donné ?
Comment l’occupation du terrain, via une résidence, une auscultation active, sur une certaine durée, peut permettre de creuser les sillons d’écoute qui feront sonner les espaces, sans surtout rien en bouleverser, juste en mettant en valeur les beautés intrinsèques d’un bel existant ?
Comment jouer sur un partage d’amours pour les paysages, les sites, les territoires explorés ? L’amour n’est pas un état suranné ni galvaudé, il faut revenir à aimer véritablement des choses a priori simples, partagables et fragiles. Le paysage (sonore) en est une.
Comment faire que cette démarche, sans doute ambitieuse, se construise dans un terreau fertile, se ramifie tout en s’enrichissant de moult lieux et rencontres, ici ou là, voire plus loin, ou ailleurs ?

CICAPES – Centre Internationnal de Création Artistique pour le paysage et l’Environnement Sonore

LE CICAPES QU’EST-CE ?

Desartsonnants

Parcours Audio Sensible (PAS) à Lausanne (CH) Journées des Alternatives Ubaines 21015 http://alternativesurbaines.ch/le-quartier-du-vallon/

Desartsonnants se déclare comme le fondateur et administrateur du 1er CICAPES (Centre International de Création Artistique du Paysage et de l’Environnement Sonore) connu à ce jour. N’étant soutenu par aucune institution ni autre organisme, il s’offre en toute liberté ce petit plaisir. Parfaitement nomade, il peut venir chez vous si vous l’invitez. Assurément indépendant, il accepte toute aide pour développer ses créations in situ, médiations et recherches (voire la page d’accueil https://desartsonnants.wordpress.com/)… A bon entendeurs salut !

POINTS D’OUÏE – LA MINOTERIE DU SEUIL DE NAROUZE (Aude – France)

Minoterie de Naurouze

Le bruissement des lieux et La clé des Dormants

Parcours d’écoute entre eaux, vents et pierres
Le bruissement des lieux

Minoterie du Seuil de Narouze (Aude)
sur l’invitation d’Alain Joule et de Pascale Goday 
dans le cadre du Méta-Opéra « La clé des Dormants »

A mon arrivée, de très belles surprises, trois éléments se partageaient la vedette pour donner au lieu une incroyable force physique, esthétique, et dynamique.
Le premier à m’accueillir fut le vent. Un grand vent d’Autan, coutumier de cette région, omniprésent et tempêtueux ce jour là. Ce vent gronde, balaie les feuillages à qui il donne voix, du sourd gémissement aux bruissements des peupliers trembles les bien nommés. Il s’engouffre dans les fous les espaces de la minoterie, par le moindre interstice, la moindre tuile mal ajustée, et donne à chaque pièce, à chaque couloir, une couleur sonore différente. C’est un vent maestro, virtuose, même si dit-on, à forte dose, il rend fou par l’intensité de sa présence et sa pugnacité à secouer le paysage. Durant notre balade, il fut néanmoins un allié de poids qui, loin d’écraser l’écoute, lui donna mille reliefs au gré de ses bourrasques, accalmies, et des sites traversés, plus ou moins protégés ou exposés, naturels ou bâtis.
Le second élément rencontré, incontournable lui aussi sur ce site fut l’eau. La minoterie du Seuil de Narouze a naturellement construit son moulin sur un cours d’eau, et est de plus située sur une ligne de partage des eaux, à quelques centaine de mètres du canal du Midi et d’un lac artificiel, bassin de rétention construit sous le règne de Louix IV. L’eau est donc elle aussi une constituante des plus importante du site. Elle est d’ailleurs ici exploitée de façon très complexe pour la régulation et l’irrigation des plaines agricoles du Lauragais. De nappes tranquilles et silencieuses en des rigoles ou bassins encaissés, d’ou elle surgit par des boyaux rétrécis, avec un grondement imposant des puissantes basses, l’élément aquatique propose une riche palette de sonorités. Ces nombreuses manifestations la rendent acoustiquement présente quasiment partout sur le site, à différents degrés, pour le bonheur du promeneur écoutant. Un espace tout à fait magique est la salle des turbines, sous la minoterie. On y accède par un escalier escarpé qui nous amène au cœur d’une immense salle où se dressent d’énormes machineries, turbines, tuyaux… décor de science-fiction à la Jules Verne noyé dans un tonnerre aquatique véritablement assourdissant. A la fois un émerveillement mais aussi, paradoxalement, un enfer pour les tympans pour qui s’y attarderaient trop longtemps.
Un des gestes les plus intéressants de ce parcours fut le grand nombre possibles de mixages eau/vent, en jouant sur des approches ou des éloignement progressifs des sources aquatiques, fondus enchaînés auriculaires, laissant plus ou moins de place aux éléments dans leurs équilibres, ou déséquilibres, dans leurs maîtrises ou hésitations aléatoires.
Et enfin le troisième élément à m’accueillir dans ses murs fut la pierre. L’imposante masse de la Minoterie désaffectée, de ses différents corps de bâtiments sur deux étages, traversés de cours d’eau aménagés, avec le moulin, les silos, les habitations, la sale de lavage, les espaces de séchage… Déambuler dans un tel lieu, au volume impressionnant, offre un choix de points de vue et de points d’ouïe qu’il faudrait prendre beaucoup du temps pour en explorer toutes les finesses. Néanmoins, après une écoute rapide, ces espaces sonnent chacun de façon différente, avec plus ou moins de porosité avec l’extérieur. Des escaliers en bois craquent joliment, une salle avec un bassin de lavage présente une acoustique tout à fait remarquable, endroit idéal pour installer temporairement des sons décalés via des craquèlements de céramiques mêlés à des chants d’oiseaux malgaches et à l’échauffement vocale de l’artiste Pascale Goday captée quelques heures plus tôt in situ… Une grande cage-Volière dans le hall d’entrée se comporte, explorée au stéthoscope, comme une incroyable harpe métallique, avec des résonances et des harmoniques que l’on excite de la main, et qui chantent différemment selon les caresses, tapotements ou pincements de ses cloisons en fil de fer. Dehors, on explore le grondement d’une chute d’eau du trop plein « la rigole » alimentant anciennement le moulin. Sans parler de tout ce qui a échappé à mon oreille tant le lieu et vaste et riche…
J’avais au départ imaginé, au vue des photos du site, un parcours essentiellement intérieur, architectural en quelque sorte. Mais c’était compter sans la beauté et la richesse de l’écrin extérieur que je ne pouvait plus, arrivé sur place, ignorer. Le parcours joua donc sur des rapports extérieurs – intérieurs, ce qui nous amena à ressentir sensiblement les espaces les volumes, et leurs ambiances spécifiques, et tous les « sas auditifs transitoires » qui les relient.
La question liée aux rapports de l’écoute in situ et à la prise en compte de l’écologie sonore, à noter que nous étions à la date de la « Word Listening day 2014 », amena à un sympathique débat avec les promeneurs écoutants du jour, dont la propriétaire, qui fut ravie de redécouvrir le site et son propre bâtiment à l’aune de ses oreilles.
Ce parcours fut suivi d’un autre parcours Méta-Opéra « La clé des Dormants », écrit parAlain Joule et interprété en duo avec Pascale Goday. Œuvre protéiforme, alternant jeu instrumental, chant, déambulation, actions, peintures, installations plastiques, projections vidéos et sonores… Cette Clé des Dormant place la communication entre les hommes comme sa problématique centrale. En 10 tableaux écrits dans les murs de la Minoterie, s’y référant, les citant, les magnifiant, le duo d’artistes donne 14 fois la représentation de ce spectacle, chaque fois différent, peaufiné, élargi par notamment la magie des lieux et le travail in situ. Moments magiques, synesthésiques, profondément humains…

Gilles Malatray le bruissement des lieux  -Vidéo d’Alain Joule

Merci Alain et Pascale pour ces très belles rencontres.

http://fightersoftenderness.blogspot.fr/

POINT D’OUÏE – LA SALINE ROYALE D’ARC ET SENANS

Des Arcs et sonnances, paysages sonores rayonnants de la Saline Royale

Depuis plusieurs années, je viens régulièrement sur le site de la Saline, à différentes occasions. Je suis chaque fois plus fasciné que jamais par une sorte de résonance, de halo intangible, que je ne pouvais jusqu’alors, au-delà de la beauté physique du lieu et des choses vécues, m’expliquer vraiment.

Dernièrement, après une énième d’écoute rituelle, nocturne, au centre de la grande pelouse, alors que toute activité s’était progressivement apaisée, j’ai commencé à comprendre comment s’opérait la magie des lieux, celle en tout cas qui me captivait tant. Il me semblait tout d’un coup qu’une porte s’ouvrait entre un moi sensible, réceptif, et le lieu, alors que je me fondais dans un ambiance où l’œil comme l’oreille étaient en parfaite accordance. Je me sentais devenir progressivement un élément symbiotique entre un lieu, ses ambiances et l’écoutant posté que je j’étais. La Saline devenait soudain un grand réflecteur amplificateur sonore, me plaçant dans une focale rayonnante, comme au centre d’une bulle d’énergie sensible. L’effet panoptique m’irradiait, immersion intense où sons et images vous rassemblent en même temps qu’ils vous tirent vers des lignes de forces périphériques, des attirances tantôt centripètes, tantôt centrifuges, plaçant l’oreille au centre de l’écoute, exactement ! 

Le panoptique évoqué n’est pas ici envisagé dans une position d’un œil ou d’une écoute dominante, de la position de celui ou de celle qui voit et entend tout, mais comme un espace focal rayonnant, point de jonction, voire de construction endogène, d’un paysage sensible, et entre autre sonore.

La Saline royale pouvait dés lors, pour moi, trouver cette fascinante cohérence que je pressentais depuis déjà quelques années, pour me proposer un site à arpenter comme un vaste territoire d’écoute rayonnante, chambre d’échos multiples, de déambulations, toutes oreilles ouvertes, théâtre potentiel, à ciel ouvert, d’écoutes, de captations et de créations sonores in situ… Un point d’ouïe niché au sein de l’imposante utopie architecturale de Claude Nicolas Ledoux.

Topophonies, hétérotopies, hétérophonies

Il s’agit dés lors de construire un paysage/territoire sonore rayonnant, partant de la grande pelouse irradiante et de ses surprenants échos, reliant tous les éléments d’une architecture en un site acoustique renforcé. D’ici, du centre de la pelouse, visuellement comme acoustiquement, part une multitude de lignes et de chemins qui nous attirent, ou nous poussent vers l’extérieur… Point de passage focal, convergence  quasi obligée, ce point d’écoute central symbolise, voire matérialise une loupe, une écoute rayonnante, qui nous emmènera vers différents ailleurs acoustiques, du panoramique au détail, de l’intime à l’extime, du dedans au dehors, du visible à l’invisible, de la matérialité à l’imaginaire…

Ces lignes sonores nous conduisent ainsi vers,

l’acoustique des grandes bernes,

des autres bâtiments, intérieurs extérieurs…

vers Les jardins,

vers la grande porte, sas, passage  du dedans vers le dehors,

vers le village

Vers la forêt voisine, pourquoi pas…

Une auscultation hétérotopique nous ramène  néanmoins toujours au centre de la Saline, comme un puissant aimant auriculaire fédérateur.

Chronosonie, uchronie

Le site de jour, de nuit, à différents moments, à différents degrés de sérénité, de bruissonnance ou d’effervescence, à des moments de bascules, d’indécisions… Le site et son histoire cachée, enfouie, des réminiscence historiques, salées, tangibles et invisibles…

Le corps écoutant, au centre d’un paysage sonore panoptique

Saisir, de l’oreille et du magnétophone, les différentes strates sonores intrinsèques du lieu, en tirer des fils du centre vers l’extérieur, et vice et versa, implique une approche physique. Il s’agit de marcher, arpenter, errer, passer d’ici à là, lentement, rapidement, flâner, chercher les fondus, les coupures, les masquages, user le lieu à force d’écoutes, s’en imprégner jusqu’à en faire partie intégrante, s’y fondre comme une particule sonore élémentaire…

On envisage ainsi une multitude de balades, parcours sonores, in situ/out situ… Il nous faut creuser le lieu pour en dénicher la moindre parcelle sonore suceptible d’asseoir une architecture pétrie de pierres et de sons.

http://www.salineroyale.com/

POINTS D’OUÏE – LE SENTIER DES LAUZES

POINTS D’OUÏE

LE SENTIER DES LAUZES

1ère journée, la résistance acoustique des Lauzes

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L’immense plaisir de me poster au cœur d’un Oto Data d’Akio Suzuki, pour moi un très grand maître de l’écoute !

Il est un sentier de randonnée, niché au creux des Monts d’Ardèche que je rêvais depuis longtemps de parcourir, tout au moins d’en découvrir de visu, à bout de pieds, quelques parties. Ce sentier, le Sentier des Lauzes pour le nommer, est un itinéraire de randonnée aménagé, ponctué d’œuvres de différents artistes, dont Akio Suzuki, Gilles Clément, Christian Lapie, Domingo Citsernos…

Invité par Raymond Delepierre, nous partîmes donc, sur deux jours, oreilles et regard à l’affut, en exploration de cette incroyablement belle région, où les points de vue offrent de majestueux débouchés sur des vallées encaissées, des collines escarpés à la végétation méridionale, des sentiers qui nous emmènent de surprises en surprises. Ici la pierre grise, la lauze est reine. Elle est travaillée, assemblée avec un art consommé, pour donner corps à de somptueuses maisons lovées à flanc d’escarpements rocheux, sur le lit de rivières temporairement asséchées, ou sur des promontoires aux vues imprenables. La lauze se décline en d’innombrables murets et pavages qui se fondent dans le paysage pétri de matières minérales où de très vieux volcans se décèlent encore. Il est d’ailleurs très difficile de décrire, pour qui n’y est jamais venu, cette région dessinée autour de la sinueuse rivière de la Drobie

Pour ce qui est de la première journée, si la vue offrait sans retenue moult paysages tous plus enchanteurs les uns que les autres, les sonorités du pays, sans être pauvres, présentaient une certaine résistance à l’oreille. En fait, le paysage sonore n’était pas, a priori, en adéquation avec le paysage visuel. Il était beaucoup plus retenu, discret, intime, presque caché pour une oreille non avertie. Bien sûr, quantité de sources sonores étaient bien présentes, cigales ponctuant l’espace de rythmes presque réguliers et pourtant capricieux, oiseaux, bruissement du vent dans les grands feuillus, voix réverbérées qui montaient de gorges encaissées… L’auricularité du lieu n’était pas, loin de là, indigente. Pour autant, dans une idée de partage d’écoute, je pensais que la mise en place d’un parcours ou d’une promenade sonore, dans la partie où nous étions, était difficile à faire nettement ressentir à un promeneur non initié, non habitué à une écoute profonde, active. D’où mon expression de résistance des lieux qui ne s’offraient pas spontanément à qui les parcouraient, sans une attention très soutenue, une ouverture d’esprit, un état de réception sensorielle presque exacerbé. Sinon, le paysage visuel noierait l’espace sonore de son imposante majesté, ce qui n’était peut-être somme toute pas si grave que cela, tous les éléments d’un paysage ne pouvant pas se montrer ou s’entendre dans un parfait équilibre.

Cette première journée m’a également permis de découvrir de près les sculptures de Christian Lapie (Silence des Lauzes), d’Akio Suzuki, un grand maître de l’écoute (Oto Date) de Domingo Cisneros (Paroles de Lauzes) et de Gilles élément (Belvédère des lichens). Que du bonheur !

2e journée, l’ouverture tympanique des Lauzes

La deuxième journée nous amène dans un splendide village, Dompnac, niché au creux d’une vallée encaissée, à la confluence de trois rivières descendant des collines abruptes, contre lesquelles la petite bourgade et adossée.

Ici, à la différence avec la première partie du sentier que nous avons exploré la veille, tout semble soudainement, à l’oreille en tous cas, s’éclairer, devenir limpide, lisible, presque palpable.

Un coq nous fait découvrir de son fier chant de magnifiques et longues réverbérations portées et entretenues par les collines voisines. Bien que très asséchés dans cette période de grande sécheresse, les ruisseaux animent néanmoins le site à hauteur de deux ponts d’où l’on peut jouer à mixer progressivement les rives droites et gauches par des fondus déterminés via de lents allers-retours entre les deux parapets de pierre. La quasi absence de circulation automobile permet de jouer ainsi sans risques.

Deux belles cloches en campanile de lauzes coiffent l’église attendant de réveiller la vallée de leurs tintements d’airain.

Malgré la chaleur étouffante, des voix s’échappent des maisons où l’on se tient sagement à l’ombre.

Un théâtre de verdure aménagé laisse penser que le site a été prévu pour des représentations de plein-air.

Un banc surplombant la vallée fait office de point d’écoute des plus agréable.

Le site sonne délicatement, très équilibré, véritable entonnoir acoustique qui fait que nous avons l’impression de nous trouver au cœur d’une immense oreille de pierre, construite par le village-même et les collines et vallées environnantes.

Certaines époques, au printemps par exemple, après une période pluvieuse, un orage, doivent voir le site s’animer de bouillonnements et de grondements aquatiques beaucoup plus toniques qu’en cet été caniculaire et desséchant.

Tout ceci n’est pas sans donner des idées désarçonnantes. On envisagerait ici un beau PAS (Parcours Audio Sensible). Tout d’abord un séjour pour ausculter le village de fond en comble, en prélever des sons, les agencer pour une composition sonore qui pourrait être diffusée dans le théâtre de verdure, pour clore par exemple une balade écoute publique. Le site serait également un terrain propice à l’élaboration d’un petit parcours où une signalétique nous inviterait à tester des postures d’écoute, et pour asseoir le parcours, on inaugurerait un point d’ouïe à cartographier et à répertorier dans la liste des petites et grandes merveilles auriculaires naturelles. Il est des lieux qui font rêver l’oreille en même temps que les yeux…

3e journée, ouverture panoramique du belvédère de Beaumont

Nous sommes ici hors du sentier des Lauzes, tout en haut de notre camp de base, dans le très beau village de Beaumont, perché comme son nom l’indique sur une colline dominant un imposant panorama de pierres et de verdure entremêlées.

Un agréable sentier de sous-bois nous amène à la table panoramique de la Croix de la Tourasse d’où nous embrassons du regard quasiment 360°, à un arbre près qui nous cache une petite portion du paysage.

Question – l’oreille jouit-elle du même grandiose effet panoramique que la vue?

Réponse, à priori non, le paysage sonore n’est pas tant s’en faut aussi majestueux et attirant que celui qui s’offre au regard;

Pourtant, en y prêtant attention, le panoramique sonore est bel et bien présent, et qui plus est très riche. Il nous faut pour cela faire l’effort de porter l’oreille au loin, de projeter l’écoute vers les fonds de vallées, les villages, les routes, ne pas se contenter du proche espace acoustique, plus facile à cueillir. Alors on découvre une fine spacialisation sonore où des outils électriques, des sautes de vent chahutant les feuillages, quelques rares voitures, des cigales pointillistes, des chiens au loin, construisent un espace d’écoute qui se plaque délicatement sur le panoramique visuel. Comme pour le premier tronçon du sentier, cette scène acoustique ne se livre qu’avec un peu de patience, d’immobilité, d’attention. Lorsqu’on la découvre, nous prenons ainsi possession d’un immense cercle sonore, que nous écoutons en surplomb, dans une attitude proche de celle convoquée par la « Plateforme des lichens » de Gilles Clément. Le regard et l’oreille dominent, tout en allant pêcher au loin des accroches paysagères reconstituant un vaste théâtre auditif panoramique. Si le paysage visuel est imposant, le sonore lui se fait plus discret, mais reste néanmoins bien présent dans un grand arc de cercle nous positionnant à un focus d’écoutant au centre des sons exactement.

Un grand merci à Raymond Delepierre et Catherine pour m’avoir si gentiment  invité à découvrir tous ces superbes paysages sonores et visuels.

Album photos cliquez ici

http://www.surlesentierdeslauzes.fr/

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