Cartographie sylvestre, sève de l’écoute

Me concernant, la magie des cartes géographiques, leur pouvoir de séduction dirais-je, leur potentiel à stimuler l’imaginaire, à convoquer le récit, tient à un pouvoir évocateur parfois mystérieux. Les masses colorées, les formes qui s’y dessinent, les reliefs qui s’y devinent ou s’y lisent, les cheminements qu’un marcheur écoutant peut imaginer… y sont sans doute pour quelque chose.


J’ai été, il y a quelques mois, fasciné par une carte représentant les cours d’eau français, leurs bassins versants plus exactement. Le graphisme très coloré montre un caractère veineux, dynamique, méandreux, quasi artériel, qui a nourri, réactivé et rafraichit une série de projets autour des flux aquatiques et de leurs paysages sonores intrinsèques.


J’ai ces jours-ci été attiré par une autre carte. Celle du boisement du territoire français, avec ses dégradés de verts plus ou moins soutenus.
Cette carte a immédiatement interrogé des actions que je mène ou ai menées dans le Bordelais, la Franche-Comté, et le terroir du Haut-Beaujolais, mon lieu de résidence aujourd’hui. Ce dernier, dans un relief de moyenne montagne, compte plus de 60% de terrains boisés, sapins et épicéas omniprésents. Ce qui influe forcément une économie, des professions et des modes de vie très liés à cette sylviculture quasi immersive. Ce qui conditionne également une façon de bouger, de regarder, de manger, de mettre un imaginaire en marche, nourri entre-autre de contes forestiers. Un environnement boisé qui me stimule pour enclencher des postures d’écoutes baignées d’ambiances sylvestres, et surtout moteurs d’écritures sonores éminemment contextuelles.

Une carte de PAS – Parcours audio Sensibles – Maillage territorial

En complément de l’article précédant, autour des PAS – Parcours Audio Sensibles Desartsonnants, voici le lien d’une carte de PAS géolocalisées, ici ou là, ailleurs et plus loin…

Fabrique de Paysages sonores et territoires auriculaires en chantier.

Cliquez sur la carte pour accéder à la version interactive

Carte de points d’ouïe

Deux villages accolés.
Luz Saint-Sauveur d’un côté de la rivière Le Bastan.
Esquièze Sère de l’autre.
Des Points d’ouïe.
Des bancs d’écoute.
Des promenades.

Cliquez sur la carte, quelques points d’ouïe

Puis cliquez sur les points pour en savoir plus

Résidence audio paysagère accueillie par

Le Hang-Art à Esquièze Sère

Le Ramuncho Studio à Luz Saint-Sauveur

Partition de PAS – Parcours Audio Sensible N° 22 « Lignes et cercles »

Lieux : N’importe où, site urbain, périurbain, rural, naturel….

Publics : Tout public, solitaire, en petit groupe

Temporalité : A définir selon l’exploration, le parcours choisi, le temps imparti…

Actions :
Choisir un lieu, une ville, un quartier, une forêt, un site spécifique…
Avoir de préférence une carte du lieu, matérielle ou numérique, embarquée.
Définir un périmètre du PAS, des limites.
Choisir une option de déambulation, en ligne droite, est/ouest, nord/sud, ou en cercle, dans le sens des aiguilles d’une montre, ou inversement.
Tracer un itinéraire d’après ces choix, de X à Y en ligne droite, en cercle…
Le marchécouter en essayant de respecter un maximum le tracé, mais en jouant, par la force des choses, avec les (nombreux) obstacles du terrain.

Jouer des contraintes, aléas, imprévus, obstacles, contournements…

Remarques :
Des aménagements ou spécificités typologiques peuvent parfois favoriser l’exécution et le suivi d’un tracé (route, cheminement piéton, rives, périphériques…)

Point d’ouïe, portraits, cartographies…

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Traces vibratiles de David Bartholoméo , PAS – Parcours Audio Sensible en duo –  Ile Barbe Lyon 9e – Projet collectif Titre à venir, autour de l’anthropocène

Supposons que le territoire, le paysage, soient aussi sonores. Et ils le sont, pour le meilleur et pour le pire.

Supposons que nous voulions, avec des résidents, des enfants, d’autres, tout d’abord les marcher, les écouter, les apprivoiser.

Supposons que, avec les mêmes personnes, nous voulions en dessiner leurs contours, même mouvants, à l’oreille, les cartographier, en faire, par différents dispositifs et médias, un, ou une série de portraits sensibles, auriculaires…

Il n’y a plus qu’à…

PAS – Parcours Audio Sensibles et Points d’ouïe sur bancs d’écoute, parcours et cartographie

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City Sonic -Mons (Be)

 

PAS – Parcours Audio Sensibles et Points d’ouïe sur bancs d’écoute

J’envisage généralement deux principales postures physiques, pour écouter, tout simplement, et mettre en scène, et ou en action, un ou plusieurs Points d’ouïe.
En plus du fait d’être promeneur-écoutant, voire écouteur public, je m’efforce de mettre en scène des espaces d’écoute(s), afin de pouvoir partager ces ambiances où finalement, l’immatérialité des sons pose un voile parfois assez épais sur les oreilles potentiellement intéressées. Souvent, lorsque l’écoute se porte consciemment sur des lieux, cela tient du fait que ces derniers sont soumis à des déséquilibres sonores parfois extrêmement violents, à la limite de l’invivable, d’une insupportable pollution acoustique. Il est évident que, si nous ne pouvons ignorer ces situation de crise, d’excès, il ne faut pas attendre qu’elles se généralisent pour porter une écoute active sur notre environnement. Nous ne pouvons pas non plus ne montrer que ces points de déséquilibre stressants, en ignorant le fait qu’il existe encore, pour l ‘instant, de beaux oasis sonores, y compris en hyper centre urbain.
Bref je tente de mettre en scène ce que le paysage sonore possède comme des aménités environnementales constructives, pour ne pas tomber dans le panneau sclérosant du bruit sans autre échappatoire que de s’enfermer dans un habitat cocon isolé, dans une situation quasi autistique.

L’écoute se pratique bien évidemment au cœur des sons, des cités, de l’espace public, et des personnes qui l’habitent et le façonnent au fil de leurs activités.

Je procède par une approche d’écoute immersive, si possible dans des laps de temps suffisamment conséquents pour prendre la mesure des ambiances sonores, mais aussi plus globalement des ressentis plurisensoriels.
Deux postures se sont ainsi imposées au fil des expériences, l’une statique, en situation d’affut, de guetteur qui laisse venir à lui les sons, l’autre en mouvement, via la marche, pour aller vers les sources sonores, et en mixer des ambiances au gré des PAS.

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Invitation à l’écoute

 

Je parlerai ici de la première, celle qui s’effectue de façon statique, immobile, et le plus souvent assise.
J’ai très rapidement élu domicile, en tous cas dans des situation d’écoutant, sur des bancs publics, ceux que je nomme souvent « Bancs d’écoute ». Ils se sont révélés d’excellents points d’ouïe, faisant face à des situations urbaines, ou non, très variées, tantôt sereines, tantôt turbulentes, étant parfois situées dans des lieux surprenants, atypiques. Certains bancs sont posés de façon assez anachronique, faisant face à une rue, tout en tournant le dos à une forêt, un magnifique panorama, une rivière de beaux cas d’étude.
Mais pour moi, c’est bien la visée sonore qui m’intéresse dans un premier temps.
Je suis capable de m’assoir parfois deux à trois heures consécutives sur un même banc, voire plus, écoutant, regardant, notant, enregistrant, parfois conversant… Ce mobilier devient alors, lorsque le temps le permet, un bureau de travail provisoire, susceptible ainsi de se déplacer dans différents points d’un quartier, de la ville, dans différentes cités, via une forme de construction géographique studieuse autant qu’audiophile. Prenant mon propre quartier et ses bancs comme terrain d’expérimentation, tel un laboratoire auriculaire urbain, ou, modestement, une ré-écriture de la performance de Georges Pérec qui tentait de mener à bien l’épuisement d’un lieu parisien, j’ai ainsi cartographié, au fil des écoutes assises et publiques, une série d’ambiances finalement assez caractéristiques, en fonction des jours, des heures, et des saisons.
Il me faut, comme lors des PAS – Parcours Audio Sensibles, construire dans une certaine durée, dépassant de très loin es quelques minutes accordées à des pastilles sonores radiophoniques, pour viser une immersion qui se compte plutôt en heures. Il me faut aussi tabler sur une répétition, une itération des écoutes, sur un même banc, sur une compilation de situations qui feront que j’appréhenderai les scènes acoustiques comme des pauses non contraintes par des rythmes de vie trépidantes, mais visant plutôt le repos du flâneur, une certaine aspiration vers la lenteur, le non pressé, le temps de vivre, de ressentir à l’envi. Pierre Sansot avec ses ouvrage « Du bon usage de la lenteur » et « poétique de la ville », mais sans doute aussi un Gaston Lagaffe travaillant à « rebrousse poil » sont des références des plus inspirante dans mon appropriation en mode doux.

 

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Cadre d’écoute et point d’ouïe

 

 

La géographie des mobiliers, la spécialisation des bancs dans l’espace public, urbain, dessine une forme de parcours qui nous conduit d’un point d’ouïe à l’autre, jouant sur les différences sensibles d’un espace à l’autre.

J’ai ainsi conçu un dispositif, un mode d’écriture de PAS qui sont directement liés à des implantations de mobiliers urbains, ici les bancs, sachant que, d’une ville à l’autre, ou dans différents villages, les déambulations, les modes de jeu, seront très donc différents.

J’ai expérimenté ces parcours dans différentes villes ou villages, de Mons (Be), Lausanne (Ch), Malves en Minervois, Lyon, Charleroi, Paris, Orléans, Loupian, Victoriaville (Québec), Tananarive (Madagascar), Nantes, La Romieu, Cagliari (Sardaigne), Vienne (Autriche)…
Dans chaque lieu, sur chaque banc, le parcours et ses haltes sont tellement différents, que l’on peut imaginer une collection infinie de points d’ouïe, tous plus riches et dépaysants les uns que les autres.

 

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PAS – Lyon – Projet Parcours métropolitainS – ©photo Pierre Gonzales

 

Ainsi, un parcours de bancs d’écoutes géolocalisés et cartographié dans mon quartier (Lyon 9e)
https://www.google.fr/maps/d/edit?hl=fr&mid=1IEid3WtJ2bsP92Ejss-iLmauDsNnDIJA&ll=45.77441642784203%2C4.808858875940018&z=18

Un texte
https://www.linkedin.com/pulse/bancs-publics-d%C3%A9coute-gilles-malatray/

Un projet de parcours
https://fr.scribd.com/document/156704291/Bancs-d-e-coute-parcours-sonore-urbain

Desartsonnants, promeneur et metteur en écoute

Lyon le17 novembre 2017

 

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Audiographie

POINT D’OUÏE À VITRY SUR SEINE

CARTES SUR TABLE À VITRY-SUR-SEINE

Ce jour là, j’étais passé à Vitry pour discuter avec Mustafa, le directeur de Gare au théâtre de projets en cours, mais également pour me promener dans Vitry et m’en imprégner de l’ambiance. Une grande fête de quartier battait son plein, avec braderie, danses, et un personnage que j’avais envie de croiser sur l’un de ses ateliers urbains.

Dans le cadre de cetr atelier, une grande carte étalée sur une table, avec Nicolas Fonty, architecte, urbaniste cartographe, qui questionnait, animait moult conversations sur la vie du quartier (les Ardoines), et proposait un jeu débat autour des espaces encartés.

Le fait de proposer une grande carte en libre accès incitait les gens à venir spontanément autour. Tout d’abord, repérer où on habite, sa rue, sa maison, son immeuble, l’école de ses enfants, le stade, la gare. Puis commenter, ce qu’on y voit, ce qu’on y vit, les plaisirs et les petites misères, l’avenir du quartier en restructuration…

Les dialogues se nouent naturellement – On est ici – Non, la carte est dorientée ainsi on est là – Et ces travaux qui n’en finissent pas !… Rien de telle qu’une carte pour établir des contacts, faire que les passants se parlent. Dialogues confus parfois, beaucoup de voix superposées, mais néanmoins très riche.

J’avais prévu ce jour là de tendre mes micros plutôt dans le quartier, aux bords de Seine, sur la brocante…

Cependant, la richesse des échanges m’ont fait changer mes micros d’épaule et finalement passer une bonne partie de l’après-midi autour de cette table carte de discussion.

Tranches de ville à Vitry-sur-Seine, lors d’une fête de quartier.

Par Gare au théâtre, dans le cadre de frictions urbaines.