Un apéro dans un jardin, oasis de calme en centre ville.
Des discussions autour des pratiques de chacun, et bien d’autres choses encore.
Un questionnaire rédigé par Caroline Boë, notre hôte, questionnaire inspiré de celui de Stéphane Marin et aussi de Raymond Murray Schafer.
Un coin studio d’enregistrement autonome, au fond du jardin, où chacun viendra répondre aux question, raconter des bouts de balades, ressentis, plaisirs et agacements, souvenirs…
Des mots et des sons…
Des commentaires, textes produits en balade, ou après.
Distributeurs ronronnants, panneaux publicitaires, réverbération underground, voix, machines, voitures, ventilations, moteurs, métro, bruits de roulement, motos, claquements, ambiances, encore des voix, fontaines, oiseaux, vent, bips, portes, chat, musiques, réverbérations… Et plus encore aurait dit Prévert.
Un montage sonore à partir des enregistrements de Caroline et quelques uns de Gilles, montage Desartsonnants.
Cette résidence artistique est née d’une impulsion, d’un appel sur des réseaux sociaux, suite à une série de confinements et autres empêchements dus à des contraintes sanitaires rendant les déplacements, espaces de travail restreints, et productions artistiques publiques quasiment réduites à néant.
Devant cette situation pour le moins compliquée et contraignante, une résidence de forme assez libre voit le jour, par l’invitation spontanée et généreuse de Caroline Boé, artiste sonore et chercheuse autour de la pollution sonore « invisible », due à des micros sonorités envahissant insidieusement nos espaces de vie.
Balades écoute en duo, solitaire, groupe, enregistrements, échanges et conversations autour de nos pratiques, rencontres, écritures multiples, arpentages s’en suivront joyeusement, comme une sorte de workshop un brin free style, ballon d’oxygène jouissif dans ces situations sanitaires tendues.
Premier volet d’une série de rencontres à venir, d’expériences à construire, de récits à croiser ; les oreilles ont besoin d’air, le corps d’espaces et de rencontres…
Remerciements
À Calorine et Jean-Eudes qui m’ont si gentiment accueilli et offert un lieu de travail formidable ; à leurs salades et petits plats riches en couleurs et goûts
À Éléna Biserna, Nicolas Mémain, et Caroline Boé, qui ont œuvré avec moi à l’écriture et à l’exécution polyphonique de 2M2B, une balade sensible pleine de rebondissement sonores
Aux participants, au public qui ont joué le jeu de répondre à nos sollicitations parfois bien surprenantes
A Sophie Barbeau pour la présentation visite de son beau projet de jardin partagé à la cité Castellane
Au bureau des guides pour le sympathique entretien que nous avons eu, ainsi qu’à George Withe
A tous les marseillais, marseillaises croisés ici ou là ; commerçants ou flâneurs.
Au superbe temps ensoleillé, propice à de belles déambulations
À Marseille la pétulante, qui sait offrir le meilleur d’elle-même à qui prend le temps de l’arpenter.
Premier arpentage, ces sons qui nous envahissent
Ma compère Caroline, artiste sonore et chercheuse, travaille actuellement sur une thèse autour de sons envahissants, problématique autour de laquelle elle a construit une méthodologie et des outils de création recherche.
Pour cette dernière, la promenade urbaine, l’enregistrement et la compilation description, sur un site dédié, forment une série d’outils qui vont alimenter le travail de réflexion, et questionner les auditeurs urbains que nous sommes parfois, la présence dans l’espace public ces étranges objets sonores qui peuplent, parfois insidieusement, nos espaces de vie.
Caroline m’entraine donc, dans nos premières balades, écouter ces sons parfois étrangement fascinants lorsqu’on prend le temps de les écouter. Je redécouvre Marseille par le petit bout de l’oreillette, oreille collée, sensible à des drones insistants bien que quasi ignorés, ou inconsciemment filtrés de nos conscience auditive ; effets de gommages psychoacoustiques… Protection inconsciente, sonorités résiduelles peu prises en compte dans l’aménagement urbain… Mais aussi, sans doute paradoxalement, de beaux objets sonores esthétiques pour l’artiste sonore.
Grondements, claquements, voix, bips, ronflements, ronronnements… La vie acoustique marseillaise souterraine. Un univers acoustique somme toute très immersif !
C’est un petit PAS – Parcours Audio Sensible a minima, et aussi une réunion de travail, avec un collègue, lui aussi passionné de paysages sonores, il y en a.
Nous sommes sur les bords de Saône à Lyon.
Sous un pont, le pont Schuman pour être précis, qui enjambe la Saône en reliant le 9e arrondissement au 4e.
IL fait un temps magnifique.
Nous marchons en devisant des choses sonores et de projets en cours et à venir.
C’est un quartier, le mien, que je connais comme ma poche, et sans doute mieux encore, lieu d’expérimentations auriculaires.
Sous le pont, de beaux reflets aquatiques animés font spectacle, sous le tabouret bétonné de cette architecture réfléchissante.
Et en écho, le mot est ici adéquat, un effet sonore singulier et surprenant. L’écho justement.
Sept échos en réponse à nos sollicitations sonores, identiques à ceux rencontrés en paysage de moyenne montagne, le Haut-Jura étant un territoire on ne peu plus sonnant.
Trois puissants, suivis de quatre brutalement estompés, allant decrescendo jusqu’à tendre l’oreille.
On en joue sans compter, à la trompe, à la voix, au mains claquées.
Les passants sont interpellés par nos jeux, les oreilles titillées, amusés, surpris, dubitatifs…
C’est un de mes points d’ouïe fétiche, que je ne me lasse de faire sonner, et de faire découvrir.
C’est un micro spot d’écoute où il pourrait se jouer bien des choses, sans grand dispositif, juste les lieux sonnants et les sonneurs joueurs.
Cela fait maintenant longtemps Longtemps que j’écoute Longtemps que je marche Longtemps que j’enregistre Longtemps que j’installe des sons Longtemps que j’en triture Longtemps que j’en joue Longtemps que j’écris autour du dit paysage sonore. Donc le risque est bien là Celui de s’encroûter De s’endormir De rouiller De s’ennuyer D’ennuyer De tourner en rond Ou en d’autres formes géométriques. Innover n’est pas chose simple Inventer encore moins. Alors l’expérience aidant Peut-être Il faut que j’expérimente Comme échappatoire inconditionnel. Des choses pour moi inhabituelles. Par exemple repérer un parcours d’écoute Et surtout ne pas le suivre Ou le prendre à l’envers, à rebrousse-poils d’oreille À contre-sens Enregistrer des sons Et en utiliser d’autres Utiliser un logiciel qui n’est pas prévu pour ce que je vais en faire Une carte géographique qui n’est pas celle du lieu marchécouté Un micro à contre emploi Des sons que je déteste Des lieux où je me sens mal Des contraintes à la limite du paralysant Faire avec ou tenter de, avec des gens qui ne croient pas au projet Avec des dénigreurs patentés Avec des détracteurs stimulants. Se tracer un cheminement pour mieux s’y perdre. Toujours remettre tout en cause. Penser à des choses improbables, irréalisables Les expérimenter malgré tout Et voir ce que l’on peut en garder au final, même a minima S’écrire des partitions que l’on ne jouera pas, ou de façon aléatoire Avec beaucoup de dissonances, de fausses notes, d’erreurs assumées Trop aléatoire pour qu’il en reste quelque chose de reconnaissable Accueillir tout ce qui peut l’être, sons, ambiances, personnes Changer de rythme, ne plus rechercher l’apaisement, le ralentissement, mais l’emballement, l’accélération Varier les rythmes, alterner tensions et détentes, speed et zen Ne pas focaliser, ne pas porter attention, laisser faire, laisser venir, sans volonté de contrôler quoique ce soit. Privilégier l’informel, le non cadré, le non programmé Chercher le dés-œuvrement, dans toute la polysémie/polyphonie du terme Expérimenter les variations, les distorsions, du micro changement au chamboulement radical Explorer les lieux les plus insolites, les postures physiques les plus saugrenues Réitérer moult fois le même geste, le même parcours, jusqu’à en éprouver l’usure, la dégradation Ne pas se donner de limites, de fenêtres spatio-temporelles, faire où et quand bon nous semble Demander des sons à des cuisiniers, mécaniciens, barmen, et même à des musiciens Ne pas avoir de projet et aller à l’instinct, à l’improviste, aller nulle part et partout à la fois Imaginer et tester tous les brassages possibles, imprévus, inattendus, voire des plus anachroniques si ce n’est contre-nature Faire confiance au hasard, le provoquer si nécessaire, rechercher l’aléas Ne pas fuir l’inconfort Faire comme si tout était inouï, jamais vu, jamais entendu Être en capacité de surprendre, d’être surpris Être en capacité de se surprendre soi-même