Marcher – marché – écouter

Petite extension du domaine d’écoute.

Quittant momentanément les alentours de Tourzel-Ronzières, mon lieu de résidence et d’écoute habituel, j’emmène oreilles et micros sur un marché voisin, celui d’Issoire.

Issoire, belle petite ville tout près de Clermont-Ferrand, entourée de collines et monts volcaniques, avec une architecture utilisant les coloris des roches locales, notamment des sombres et beaux basaltes.

Ce matin, jour de marché.

Et quel marché ! Un des plus beaux de France a priori, et ce n’est pas ma longue déambulation qui me fera pas dire le contraire.

Un marché qui se tient sur un grand périmètre du centre ville.

Un marché riche en couleurs, en odeurs, et en sons.

Les marchés sont souvent pour moi de l’occasion de capter de belles scènes auriculaires, présentant une grande variété de sources, d’ambiances, d’acoustiques, au détour d’une ruelle ou d’une place.

Et ici, les ruelles sont nombreuses, assez resserrées, ponctuées de places de divers tailles. 

La voix y tient naturellement le rôle principal, dans un marché espace de rencontres, de sociabilités, de retrouvailles, de discussions en tous genres, de timbres, parfois d’une pointe d’accent du cru.

Pour mettre mon oreille en mouvement, rien de telle que l’acoustique de superbe abbatiale Saint-Austremoine, à la polychromie extérieure ocre, noire et blanche, typique de la région et aux riches ornements intérieurs.

Des réverbérations magiques, magnifiant des murmures, des sons qui se promènent de travées en travées, à la fois discrets et amplifiés par la caisse de résonance du bâtiment minéral et d’imposantes proportions.

Sitôt sorti, ouverture sur un tout autre monde où tout bruissonne.

Tout bruissonne mais, dans un espace piétonnier dédié, où la voiture est absente, rien ne vient donc agresser l’oreille côté mécanique envahissante.

Une multiplicité de sons à une échelle parfaitement mesurée, où la vox humaine reste le mètre étalon et se développe dans une ambiance immersive très vivace, dynamique, tonique même, mais sans jamais être saturée. Pas d’hégémonie sonore, chaque son étant et restant  à sa place en laissant de l’espace aux autres. Un paysage hi-fi aurait dit feu Murray Schafer.

Rires

sons d’étal

de verres choqués

de sacs frétillants

de cuissons mijotées

de harangues saluantes

de cadis tressautants

sonneries de cloches

haut-parleur diffusant ponctuellement la voix d’un animateur intervieweur  mobile

fontaines

enfants courants

chiens se saluant

talons claquants

musiques ambiantes…

Puis un son remarquable. Une forge à soufflet sur un charriot; un jeune forgeron tout en muscles martelant, jouant de ses outils métalliques, actionnant la forge, sons d’inspire expire, de souffles un poil grinçants, de feux attisés… Tout une ambiance que l’on ne s’attend pas à trouver ici. Une scène impromptue, joliment surprenante.

Mes micros sont là; aux aguets, ils s’approchent pour capturer du mieux que possible cette ambiance, sous l’œil amusé et complice du forgeron.

Marcher et marchés, chacun différent, bien que quasiment universel, du son plein les oreilles, et quelques bonnes victuailles locales, fromages et charcuterie dans le sac.

Une mine vous dis-je !

Des sons à suivre…

Résidence d’écriture(s) audiopaysagère

En écoute : L’oreille nous fait marché !

Résidence d’écriture(s) audio-paysagère(s) « Installer l’écoute – Points d’ouie » à Tourzel Ronzières, Puy de Dôme, accueillie par « Danser l’espace – Sous les pommiers ba » , soutenue la DRAC Auvergne Rhône-Alpes