Chaque année, je m’installe pour quelques temps dans des lieux dits de résidence, résidence artistique, résidence de création et/ou de recherche, en tous cas d’expérimentation pour moi.
A l’origine, la résidence est notre lieu d’habitation, là où l’on réside. Pourtant, pour les artistes nomades, itinérants, qui s’installent temporairement, le temps de de faire naitre ou de maturer une œuvre, de la mettre en scène, en espace, ou bien de travailler aux processus qui le permettront, aux outils, aux expérimentations de terrain, ce n’est pas la cas.
La résidence est une étape, quelle que soit l’état, l’avancée du travail en cours.
Elle va offrir le cadre, l’accueil, parfois les outils et l’accompagnement, voire des moyen de production.
Si je prends le cas d’une résidence audio-paysagère comme j’aime à les nommer, il s’agira de s’installer pour dessiner avec les sons un paysage sonore singulier, non pas ex-nihilo, mais puisant dans l’environnement du lieu qui m’accueille, de ses environs.
La résidence est une immersion qui permet de se consacrer, un temps, pleinement à un projet, à faire une focale sur un travail en chantier, à venir chercher de de la ressource parfois dépaysante, inspirante.
L’immersion est une étape importante. S’immerger dans l’action, dans les lieux environnants, dans les ambiances, les rencontres, des situations nouvelles… un ressourcement vivifiant qui peut faire rebondir une action stagnante parfois faute d’inspiration neuve.
S’immerger pour expérimenter, pour tester, pour contextualiser et frotter son écoute en un lieu et temps donnés, même de façon éphémère.
C’est aussi l’occasion, la chance, de rencontrer d’autres artistes, techniciens, opérateurs culturels, élus, structures locales, et de profiter des connaissances du territoire et savoir-faire de chacun, sans parler du côté humain, relationnel de par ces échanges enrichissants.
Une résidence est une coupure de l’ordinaire qui va nous stimuler pour arpenter, écrire en fonction de, se frotter à un territoire, ce qui va sans doute ouvrir de nouvelles perspectives, de nouvelles façons d’envisager des modes opératoires comme des mises en situation.
Parcours, installation extérieure, intérieure, forme hybride, carnet de notes, une montagne ne sonnera pas comme un port, une forêt comme une ville; les espaces arpentés, écoutés, influeront nos travaux, et peut-être vice et versa.
Pour ma part, le dépaysement m’est nécessaire pour avancer. Avancer sans toutefois aller vers une précipitation effrénée et stressante. Prendre le temps, à intervalle régulier, de s’assoir pour écouter la ville, la montagne environnante, les voix et ruisseaux, prendre le pouls auriculaire. Les résidences permettent de trouver des rythmes plus souples, à la fois propices à une écriture soutenue, sans toutefois être hyper contraignants, ce qui pour moi peut devenir très vite contre-productif.
Chaque lieu où je me suis posé a amassé une pierre nouvelle dans l’écriture globale, dans la construction d’une forme d’un vaste paysage sonore partagé, quasiment universel et pourtant si singulier selon les lieux.
Résidence Audio Paysagère à Luz Saint-Sauveur, accueillie par Ramuncho Studio et HANG-ART– Mai 2021