Points d’ouïe et mises en situations improbables

Le plus difficile est de sortir des sentiers battus, fussent-ils auriculaires, de tordre des approches audio-paysagères pétries d’habitudes, d’infléchir des situations et actions pédagogiques qui s’usent au fil des répétitions et déclinaisons, d’aller là où la logique descriptive ne se suffit plus. Il ne s’agit pas de tout remettre en question, encore moins de faire table rase, mais juste de tenter un pas de côté, un coup d’oreille décalée.

Je teste ces temps-ci des approches convoquant ce que je nomme des hypothèses de situations (d’écoute) improbables.

Ces dernières sont issues d’inspirations plutôt littéraires, voire philosophiques, grand merci aux dadaïstes et autres oulipiens qui n’en finissent jamais de me surprendre et d’apporter de l’eau au moulin.

Voici, en vrac et sans commentaire, quelques unes de ces hypothèses, pensées présentement en milieu urbain, mais transposables dans d’autres contextes.

  • Imaginons que, plus nous écouterons la ville, plus cette dernière nous écoutera.
  • Imaginons que, plus nous allons nous repérer, écrire et cartographier nos cheminements d’écoute, plus nous allons nous égarer, égarer nos sens, principalement celui du bien entendre.
  • Imaginons que toute logique, tout programme d’écoute, sera contre-productif, que seul l’aléa, l’irréfléchi, le non pensé, l’improviste, puissent nous aider à construire de l’oreille des paysages viables.
  • Imaginons qu’il nous faille plonger dans le trivial, le « minumental », l’infra-ordinaire, pour concevoir une globalité sonore digne de ce nom.
  • Imaginons que, pour chaque son choisi comme intéressant à l’écoute, il nous faille lui opposer un autre qui serait plus ou moins son contraire, la face inversée d’un miroir acoustique, son binôme inséparable qui le ferait exister.
  • Imaginons que les situations auriculaires traversées, vécues, expérimentées, ne se traduisent que par des faits, actions et écritures non sonores, silencieuses, usant d’autres média, voire que le silence y suffise.
  • Imaginons que, pour révéler un paysage sonore, le faire vivre, il faille le contaminer in situ par une série d’événements improbables, inattendus.
  • Imaginons moult autres situations et hypothèses improbables…

Ajoutons enfin une dernière contrainte, celle que les postulats énoncés doivent s’inscrire dans un parcours non virtuel, expérientiel, vécu à l’échelle de la ville, et du corps, contextualisables et partageables.

Laisser un commentaire