Vestiges sonores nocturnes, prélude et alimentations fantômes

@Gauthier V. Charleroi friches

Existe t-il une forme d’urbex auriculaire, une archéologie excavatrice du sonore, une exploration auditive plus ou moins sauvage, un brin fantastique ?

Qu’est-ce que la nuit nous raconte, nous susurre au creux de l’oreille ?

Pouvons-nous installer des écoutes de lieux fantomatiques, où l’on pourrait entendre, percevoir, des réminiscences acoustiques enfouies dans les strates de l’histoire, de la mémoire, des murs et ruines, des machines abandonnées et autres vestiges architecturaux… ?

Pouvons-nous conter, raconter, broder, les ambiances sonores disparues, ensevelies ?

Pouvons-nous donner à imaginer, sans autre artifice que nos oreilles propres, les sons du passé, ceux qui, envers et contre tout, résistent à l’usure du temps, quitte à se réinventer au gré des abandons, destructions, reconstructions, marches écoutantes … ?

Inspirations:

« Elle longe la gare monumentale fermée depuis plus de vingt
ans, sans même un regard pour ce bâtiment fantôme naguère
chargé de tant d’ambitions qu’il semble annoncer qu’il restera
debout quoi qu’il arrive. Le vent qui s’y engouffre et siffle à
l’intérieur ne ressasse plus rien depuis longtemps, il ne transporte
ni les adieux, ni les mots d’amour, ni les serments prononcés sur
un quai. Il brasse le vide, la violence et les démentis du présent
comme du passé. Les mots s’en sont allés avec les gens. »

Judith Perrignon, Là où nous dansions (2021)

Ces questions Desartsonnantes sont également irriguées de souvenirs, nocturnes, déambulants, dépaysants… Ceux par exemple d’explorations nocturnes dans le quartier des Ardoines, à Vitry/Seine, longeant une ancienne centrale thermique à charbon, et d’autres arpentages sonores aux abords de Charleroi, dans ses gigantesques friches industrielles… Tous ces tuyaux, turbines, cheminées, obscures machineries tout droit sorties de l’imaginaire de Jules Verne, François Schuiten, semblant soupirer, ronronner, grogner, grincer, gémir… à qui sait les entendre.

@Gare au théâtre, PAS Desartsonnants nocturne en Ardoinais – Frictions urbaines
@Zoé Tabourdiot – Transcutures City Sonic – Desartsonnants – Exploration nocturne Charleroi.

Point d’ouïe en nuit transfigurée

Je pensais, il y a peu
Regagnant tardivement
Ma petite et quiète ville
Toutes lumières éteintes
Vers un minuit sonnant
Que le noir nocturne
Est Oh combien sonore
J’avançais prudemment
Mes pas à l’aveuglette
Sous un ciel très couvert
Un dôme ténébreux
Point de lune éclairante
Je redécouvrais ainsi
Un paysage en strates noircies
Plus épaisses dans la nuit
L’obscurité totale
Immersion fascinante
Et je lance l’écoute
Dans cette intime noir
Un presque rien nocturne
Une non voyance exacerbée
L’obscurité bruissante
Mes pas
Ma respiration
Quelques nocturnes voletant
Des voix, très lointaines
Pas de rumeur ici
De timides émergences
Et c’est très beau
Et j’en écoute encore
En marchant lentement
Puis me pose sur un muret
Les sons se raréfient
Prennent de l’importance
Dans un espace lisible
Comme un grand tableau noir
Un espace acoustique habitable
De mon muret d’écoute
Enveloppé de profondeurs
Sons inscrits dans le noir
Précisant d’obscurs contours
Ceux de la nuit justement
Celle qui porte conseil
A l’oreille noctambule
J’aimerais inviter des gens
Ceux et celles noctambules
Mais les autres eux aussi
A vivre un rituel
D’un espace nocturne
Juste pour écouter
Juste pour faire silence
Entendre les sonnances
D’une nuit chuchotante
Histoire enveloppante
Ambiances ouatée
De nature lascive
Rien ne dort vraiment
Dans d’infimes obscurs
On perçoit moult souffles
Des énergies fluantes
L’invisible ruisseau
Ses coulures si proches
Vibrations ondulantes
La vie qui bat son cours
Envers et contre tout
Ça ouvre des possibles
A l’oreille intrépide
Et à la nuit féconde.

Mars 2024, Amplepuis, écoute installée, aux alentours de minuit

Balade sonore nocturne – Field-processing with Boris Shershenkov

par PePaSon

Le 30 mai 2023, de 22h à 23h30

Balade sonore nocturne exclusive le Mardi 30 Mai 2023 avec l’artiste Boris Shershenkov autour du projet « LightHub » à l’écoute des ondes électromagnétiques omniprésentes dans l’espace urbain. RDV : Place de la République – Sous la statut devant le Lyon (22H)

*** Emmenez tant que possible un casque audio personnel avec prise jack stéréo

*** Une petite participation vous sera demandée à prix libre en liquide sur place pour rémunérer l’artiste. Merci de prévoir en conséquent .

Le mardi 22 mai 2023, à 22h00, place de la République se déroulera la balade sono-lumière Lighthub de l’artiste sonore Boris Shershenkov.

Le projet Lighthub explore l’essence des lumières électriques, qui est fondamentalement différente des sources de lumière naturelle. Les conceptions des flux lumineux technogéniques sont basées sur l’inertie visuelle humaine. Ils véhiculent une quantité importante d’informations cachées à l’œil mais situées dans les limites temporelles de notre perception auditive.Les participants à cette promenade au moyen de convertisseurs phonoptiques sur mesure auront la possibilité d’étudier de manière synesthésique les lumières de la ville telles que les publicités, les phares de voiture et les systèmes d’éclairage public, et de créer une carte lumineuse de la zone enregistrée en son.Au cours de la première partie de la marche sonore, les participants marcheront ensemble et exploreront l’environnement lumineux des zones environnantes. La deuxième partie de la promenade – l’enregistrement de la pièce cartographique « Lighthub Paris : République », au cours de laquelle les participants se déplaceront le long d’itinéraires prédéterminés en fonction de la partition spéciale de la carte.

Boris Shershenkov (né en 1990, Vladivostok, Russie) – artiste et chercheur indépendant, Ph.D. (candidat en sciences techniques), éducateur et concepteur d’instruments de musique. Se concentrant sur des projets qui développent de nouvelles méthodologies dans l’art technologique et sonore, il étudie la relation entre les humains et la technologie en combinant les techniques modernes avec la recherche archéologique des médias. Site web : https://shershenkov.com/

La durée totale de la promenade est de 1h00.

Pour participer à la marche, vous devez avoir :

1. smartphone ou enregistreur audio avec une entrée mini-jack 3,5 mm (micro cravate ou entrée casque) ;

2. une paire d’écouteurs filaires avec un connecteur minijack 3,5 mm.

Inscription Hello Asso ICI

English version 

On Tuesday, May 2023, 10:00 PM, at the Place de la République will take place the Lighthub light-sound walk by the sound artist Boris Shershenkov.The Lighthub project explores the essence of electric lights, which is fundamentally different from natural light sources. The designs of technogenic light streams are based on human visual inertia. They carry a significant amount of information hidden from the eye but located within the temporal limits of our auditory perception.Participants of this walk by means of custom-made phonoptic converters will have the opportunity to synesthetically investigate the city lights such as advertisements, car headlights and street lighting systems, and create a light map of the area saved in sound.During the first part of the soundwalk, participants will walk together and explore the light environment of the surrounding areas. The second part of the walk – the recording of the « Lighthub Paris: République » cartographic piece, during which participants will move along predetermined routes according to the special map score.

Boris Shershenkov (b. 1990, Vladivostok, Russia) – independent artist and researcher, Ph.D. (candidate of technical sciences), educator and musical instrument designer. Focusing on projects that develop new methodologies in technological and sound art, he investigates the relationship between humans and technology combining modern techniques with media archaeological research. Website: https://shershenkov.com/

The overall length of the walk is 1 hours.

To participate in the walk, you must have:1. smartphone or audio recorder with a 3.5 mm minijack input (lavalier microphone or headset input);

2. a pair of wired headphones with a 3.5 mm minijack connector.

Inscription Hello Asso Here

Des rives en rives, Walk Dating nocturne

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©photo Charlène Gruet

Une marche exploratoire du « Parcours métropolitainS »

C’est une très douce fin de journée, à nuit tombante, vers 20H30, le long des quais du Rhône à Lyon.

Trois marcheurs et quatre marcheuses, réunis ce soir là pour tester un parcours pédestre, en nocturne, au fil de l’eau.

Objectif, descendre le Rhône (une petite partie Lyonnaise) cap au sud, le longer par les berges aménagées, et remonter cap au nord, via la Saône, également par les berges aménagées.

Lyon a su, ces dernières années, mettre en valeur ses cours d’eau, et relier, connecter les piétons aux flux aquatiques.

En cette période de rentrée scolaire, la chaleur aidant, le début de notre périple sera très animé.

Les nombreuses péniches bars restaurants amarrées le long du Rhône voient leurs terrasses bondées.

D’autres préfèrent les pelouses pour siroter des bières et autres boissons.

Les conversations vont bon train.

Vélos, et différents objets roulants non motorisés filent et slaloment en tous sens.

Des voix, des voix et encore des voix, à droite, à gauche, devant, derrière, nous sommes immergés dans un flux vocalisant, riant, avec une certaine bonne humeur ambiante.

Tous les membres de notre communauté ambulante et ponctuelle ne se connaissent pas, même si, avant de nous mettre en marche nous avons discuté autour de nos pratiques respectives.

Et les « spécialités » sont variées, trek urbain, performances marchées sur un quartier Lyonnais, travail sur les formes et traces urbaines, Parcours d’écoute, doctorat autour de marches féminines Algériennes, projets de territoire, poésie, arts plastiques…

Notre groupe est vraiment pluri… et la marche nous rassemble.

D’ailleurs, tout au long du parcours, de petits groupes se créeront, se modifieront, s’aggloméreront, se séparerons à nouveaux, se reconstitueront… au fil des conversations.

Le concept du Walk Dating est né dira (et illustrera) l’une d’entre nous.

Le secteurs des péniches de loisirs étant passé, la foule, dense au début de parcours se raréfie progressivement. Nous croisons maintenant de petits groupes, étudiants en goguette, jogguers noctambules, amoureux cherchant les coins d’ombre. L’ambiance se fait plus intime.

Nous longeons l’imposante Piscine du Rhône et ses colossaux pylônes, sensés éclairer l’édifice, mais que personne d »entre nous ne se souvient avoir vu allumés.`Nous filons vers le sud, direction Perrache, pont Galliéni.

Les bas-quais, assez encaissés, nous protègent de l’agitation tonitruante des voies routières, très circulées, abrités dans un petit couloir apaisé au fil de l’eau.

Nous quittons les rives du Rhône pour enjamber le fleuve par le pont Galliéni.

Rupture.

Nous sommes à nouveaux au cœur de la ville trépidante et pétaradante, remontés en surface dirais-je..

Gare de Perrache à notre gauche, que nous longeons via la place Carnot… Des jets d’eaux glougloutent et susurrent à notre passage, et sûrement continueront-iles après.

Un quai aux ramifications complexes, envahi de voitures.

Nous descendons cette fois-ci vers la Saône, via une rampe pavée, enchâssant une étrange petite voie ferrée plus en service.

Nouvelle rupture, un apaisement s’installe.

Une installation artistiquement singulière, ou brute, de bric et de broc, au pied de la rampe d’accès aux quais semble nous faire un malin clin d’œil en signe de bienvenue. Les quais de Saône sont, dans leur début, plus obscurs, plus intimes peut-être, dans ce début de parcours, moins festifs, en tous cas que les précédents.

Ici aussi, nous marchons au en suivant des aménagements de promenades piétonnes, plus resserrées que précédemment, configuration tologique exige, parsemées d’œuvre d’art type Land Art urbain.

De longues passerelles, constructions de bois entrecroisés de l’artiste Tadashi Kawamata font sonner nos pas sur des caillebotis serpentant au dessus de l’eau.

Un pont de pierre nous révèle de beaux échos, et d’intéressantes réverbérations.

Ici et là, des groupe d’étudiants fêtant une rentrée a priori joyeuse. Nous les contournons, les traversons, les saluons, zigzagant dans ces joyeux sittings.

Une interruption dans notre parcours. Des travaux non achevés sur une centaine de mètres, dus à des problèmes de malfaçon, de maîtrise d’œuvre, d’assurance, nous oblige à rebrousser chemin pour quitter temporairement les bas-quais. Depuis quelques années, cette partie est à l’abandon, protégée de hautes grilles, attendant que se résolvent les questions technico-judiciaires pour voir le cheminement pédestre prendre totalement et intégralement forme, sans cette coupure accidentelle.

Les quais sont maintenant de ce côté-ci aussi très peuplés, très arpentés, très occupés par des groupes festifs, même si la densité de l’occupation est moindre que sur le côté Rhône.

La promenade se terminera à la hauteur du quartier des Terreaux, par un petit rafraichissement débriefing bien mérité.

Une belle promenade où lumières et sons jouent en miroir sur les eaux scintillantes.

Une presque boucle qui nous permet de tester une petite traversée urbaine nocturne, où l’espace sensible est riche de surprises.

L’envie de pousser, une fois prochaine, plus au sud, jusqu’à la pointe de la Confluence. Peut-être aussi de rejouer cette promenade en deux épisodes, Nord-Sud par le Rhône, Sud-Nord par la Saône, en l’agrandissant un peu.

Chemin faisant, nous avons construit des traces, chacun chacune à sa façon; Croquis, photos, carte sensible, texte, notre voyage de rive en rive se matérialise ainsi et construit une parcelle de mémoire, et une extrapolation du projet Parcours métropolitainS, Grand Lyon et lisières. Mémoire et outil prospectif. Comment parcourir sa ville, ses alentours, relier des points géographiques, des espaces emblématiques, ou triviaux, comment surprendre encore le marcheur ?

Aujourd’hui, les lisières, thématique qui nous préoccupe, étaient celle de l’eau, fleuve et rivière, structurant fortement le territoire Lyonnais, le centre en tous cas, prétexte à déambulations nocturnes, à expérimentations d’écritures plurielles, sensibles et kinesthésiques.

A suivre.

 

Des traces

Carte sensible ©Alice Neveu 42655872_1034913076680730_5502099512744738816_n

 

 

Album photos ©Chalène Gruet, Croquis ©Claire Daudin : https://flic.kr/s/aHsmo1wJkC

POINTS D’OUÏE À VICTORIAVILLE

SOUFFLES ET CHUINTEMENTS DE VILLES NOCTURNES

Old Air Conditioner

La nuit tombée, j’ausculte en marchant Victoriaville, petite bourgade québecoise…

Je capte ici et là, des chuitements aquatiques, automobiles, souflles cliquetants de ventilations…

Bruits blancs sur fondus au noir d’une nuit québecoise, la ville sans fard, souvent inécoutée…

La ville souffle, ici, souffler est bien jouer.

Elle s’éssouffle parfois, soupire, égraine ses respirations au fil de la rivière et des rues à demi endormies.

Des instants que j’affectionne tout particulièrement pour jouer au promeneur écoutant solitairte et noctambule.

ÉCOUTEZ ICI